Promouvoir une « alimentation saine »

Evaluation de la promotion d’une alimentation saine par des infirmières pédiatriques en Grande-Bretagne

L’obésité infantile s’accroit à une vitesse alarmante. On estime qu’au Royaume-Uni, 25% des enfants pourraient être obèses en 2050, ce qui aurait un impact toute leur vie sur leur santé et leur bien-être psychosocial.

Les infirmières jouent déjà un rôle important dans la prévention et le contrôle de l’obésité, même si on se demande actuellement si elles devraient être perçues comme des modèles à suivre et « pratiquer ce qu’elles prêchent » 1-5. En effet, le surpoids, l’obésité, la sédentarité et les mauvaises habitudes alimentaires sont fréquents chez les infirmières 6,7.

En revanche, peu d’études ont évalué comment elles percevaient les actions de promotion d’une alimentation saine auprès de leurs patients et si elles pouvaient être des exemples en matière de modèle de santé. Dans cette étude, 67 infirmières pédiatriques de 14 services d’un même hôpital de soins aigus du NHS (National Health Service) Trust ont rempli un questionnaire concernant leur poids, leurs habitudes alimentaires, leur activité physique, leur efficacité et leurs convictions de modèle de santé en tant qu’infirmières. Les participantes étaient âgées de 18-65 ans et avaient travaillé comme infirmière pédiatrique entre 3 mois et 31,5 années. Les réponses provenaient d’infirmières en salle (67,2%), d’infirmières responsables de salle (25,4%) et de cadres infirmiers (7,5%).

La moitié des infirmières pensent ne pas être de bons modèles pour les enfants et leurs familles…

Les infirmières pensent qu’il est important de se montrer comme exemple en matière de santé, cependant cette croyance est contredite par les comportements de santé qu’elles rapportent elles mêmes. Dans notre étude, les infirmières ont indiqué qu’elles étaient très inquiètes de la prévalence grandissante de l’obésité infantile (92,5%). La majorité pensait que la promotion de la santé auprès des enfants et de leurs familles devrait faire partie du travail des infirmières pédiatriques (88,1%) et qu’elles devraient montrer l’exemple en ce qui concerne une bonne santé (83,6%). Seule une minorité ne pensait pas que les infirmières « devraient pratiquer ce qu’elles prêchent » ; ces mêmes personnes étaient davantage en surpoids ou obèses. Dans l’ensemble, la moitié pensait que les infirmières pédiatriques n’étaient pas actuellement de bons modèles pour les enfants et leurs familles (49,3%). Des comportements malsains étaient fréquents, puisque, d’après leurs réponses au questionnaire, près de la moitié des infirmières étaient en surpoids ou obèses (44,8%), une majorité (79%) ne consommait pas cinq portions de fruits/légumes par jour et 30% ne respectaient pas la recommandation officielle de 150 minutes d’activité physique modérée par semaine.

Les infirmières pédiatriques pensent promouvoir de manière inadéquate une alimentation saine auprès des enfants et de leurs familles. En effet, une grande majorité (82,1%) estime que la promotion d’une alimentation saine est insuffisante sur leur lieu de travail. Dans les faits, pour près de la moitié, les infirmières considèrent qu’elles peuvent améliorer leurs pratiques personnelles de promotion de santé en matière d’alimentation saine (48%).

L’impact potentiel de leurs propres choix de style de vie

Les infirmières pensent que leurs propres comportements de santé influencent la qualité de leurs interventions de promotion de la santé, ainsi que l’inclination des patients à suivre leurs conseils. Un grand nombre d’entre elles reconnaissent d’ailleurs l’influence de leurs propres comportements et de leurs interventions de promotion de la santé sur leur entourage. Près des trois-quarts (71,6%) indiquaient que leurs interventions de promotion de la santé auprès des enfants et des adultes serviraient d’exemple d’interventions aux élèves infirmières. Plus des trois-quarts (77%) pensaient que les patients et leurs familles seraient plus enclins à écouter leurs conseils d’hygiène de vie si elles-mêmes les mettaient en pratique. Encore plus important: beaucoup pensaient que leurs propres comportements de santé influenceraient la qualité de leurs soins. 48% des infirmières disaient qu’elles auraient des difficultés à promouvoir des comportements sains chez les autres si elles ne les mettaient pas elles mêmes en pratique. L’impact potentiel de leurs propres choix de style de vie reposerait sur deux mécanismes : la perception qu’ont les patients sur l’infirmière et la volonté de celle-ci à promouvoir la santé auprès des patients et de leurs familles.

Comment améliorer leur formation ?

L’enseignement et la formation, avec un accès à des ressources documentaires basées sur des preuves scientifiques, pourrait les rendre plus sûres d’elles pour promouvoir une alimentation saine auprès des enfants et leurs familles. Les infirmières ont rapporté que leurs propres comportements sains facilitaient la promotion d’une alimentation saine auprès des enfants et de leurs familles. Au contraire, la pratique de comportements malsains créait des « obstacles » à la promotion efficace de la santé auprès des patients.

Elles ont évoqué d’autres barrières à la promotion efficace d’une alimentation saine, comme le manque de temps consacré aux activités de promotion de la santé et le manque de soutien pour les pratiquer. En tant qu’avocates de la santé, les infirmières sont bien placées pour en faire la promotion, contribuant ainsi à contrôler l’épidémie d’obésité. La promotion de la santé devrait être considérée comme prioritaire dans cette population. De plus, des interventions sur leur lieu de travail pourraient aider les infirmières souhaitant adopter des comportements sains. L’hôpital devrait ainsi apporter un soutien aux infirmières souhaitant améliorer leur propre santé.

Holly Blake
Ecole des Sciences de la Santé, Université de Nottingham, ROYAUME-UNI
Joanna Patterson
Hôpitaux Universitaires Nottingham NHS Trust, ROYAUME-UNI
Blake H, Patterson J. Paediatric nurses’ attitudes towards the promotion of healthy eating. Br J Nurs. 2015 Jan 22;24(2):108-12. doi: 10.12968/bjon.2015.24.2.108.
  1. Department of Health (DoH) (2011a) Healthy Lives, Healthy People: A call to action on obesity in England [online]. Available at: http://www.dh.gov.uk/prod_consum_dh/groups/dh_digitalassets/documents/digitalasset/dh_130487.pdf [Accessed 20 June 2014]
  2. Blake H (2013) ‘Should nurses be role models for health?’ [online]. Available at: http://www.nursingtimes.net/holly-blake-should-nurses-be-role-models-for-health/5052877.article [Accessed 20 June 2014]
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