Prévenir l’obésité infantile : des pratiques alimentaires aux recommandations nutritionnelles

France : les aliments pour enfant restent encore trop sucrés et trop transformés

Marketing alimentaire enfant - Equation Nutrition - Aprifel

En 40 ans, le nombre d’enfants et d’adolescents en situation d’obésité a été multiplié par 10 (OMS, 2017). Face à ce constat inquiétant, de nombreux auteurs alertent quant à l’impact de la publicité et du marketing pour des aliments à haute densité énergétique et ultra-transformés (Sadeghirad 2016, Clark 2020, Elias 2021). Une étude récente a notamment évalué la qualité nutritionnelle ainsi que le degré de transformation de produits destinés aux enfants, disponibles sur le marché français. D’après ce travail, la grande majorité des aliments étudiés n’est pas conforme aux recommandations des politiques de santé publique.

Les premières données sur l’obésité pédiatrique en France révèlent que 34% des enfants de 2 à 7 ans sont en situation de surpoids ou d’obésité (Ligue contre l’obésité, 2020). Parmi les facteurs à l’origine des maladies liées à l’alimentation chez l’enfant, l’influence négative du marketing et des publicités alimentaires est de plus en plus pointée du doigt. En effet, il a été démontré à plusieurs reprises que les contenus marketing ciblant les enfants influencent leurs choix, leurs préférences et leur consommation alimentaire (Elliott, 2008, Boyland, 2012), ainsi que leur perception des produits (Mzoughi, 2017, Enax 2015).

Dans ce contexte, le Club Européen des Diététiciens de l’Enfance (CEDE ) a cherché à évaluer la qualité nutritionnelle, ainsi que le degré de transformation d’aliments destinés aux enfants de plus de 3 ans – en particulier des produits sucrés – en utilisant plusieurs indicateurs comme le Nutri-Score et la classification NOVA.  

Aliments pour enfants, une majorité de produits riches en sucres et ultra-transformés

L’analyse des produits sélectionnés pour l’étude a montré que près d’un quart des aliments pour enfants contiennent comme premier ingrédient un sucre ou un ingrédient sucrant (sucre, sirop de glucose, sirop de glucose-fructose, miel, sirop de sucre inverti etc). De plus, 89,5% des produits analysés contiennent des sucres libres et ajoutés.

La classification NOVA a, quant à elle, permis de montrer que 88% des produits commercialisés auprès des enfants sont ultra-transformés. Cette observation s’explique notamment par la présence importante, dans ces produits, d’arômes et de sucres ultra-transformés comme le sirop de glucose.

Principalement consommés lors du goûter et du petit déjeuner, ces aliments peuvent ainsi contribuer à la consommation excessive de sucres totaux (hors lactose et galactose) observée par l’Anses à partir de l’étude INCA2. En effet, 75% des enfants âgés de 4 à 7 ans et 60% des 8-12 ans dépassent les seuils recommandés (Anses, 2019).

Peu de produits pour enfants affichent le Nutri-Score

Alors que le PNNS 2019-2023 recommande l’utilisation du Nutri-Score pour réduire la consommation de produits Nutri-Score D et E chez les enfants, seuls 20,8% des produits de l’échantillon affichent le Nutri-Score sur leur emballage.

Porteurs ou non du logo, 58,7% des produits analysés sont classés Nutri-Score D et E. Ce chiffre s’élève à 62,1% – avec une majorité de Nutri-Score D (39,3%) – pour les aliments et boissons contenant des sucres libres et/ou ajoutés.

Figure 1 : Distribution des groupes Nutri-Score dans les produits étudiés (extrait de la publication d’origine Robert, 2022)

Un manque de valorisation des produits Nutri-Score A

Parmi les produits étudiés, quatre catégories présentent un Nutri-Score A : l’eau, le lait entier, les fruits frais et les compotes. Pourtant, ces catégories ne représentent que 117 produits – dont 112 compotes – sur les 1 155 de l’échantillon.

De plus, les allégations santé sont rares sur ces produits, seul 1/3 d’entre eux disposent d’allégations sur les ingrédients. En effet, les allégations santé sont davantage attribuées aux produits Nutri-Score B – sur-représentés par les desserts lactés – comme par exemple : “le calcium et la vitamine D sont nécessaires à la croissance normale et au développement osseux des enfants « .

D’après cette étude, l’utilisation d’allégations nutritionnelles présente un gradient décroissant des groupes Nutri-Score A à E. Il est donc regrettable qu’aucune allégation santé ne soit utilisée pour les produits Nutri-Score A malgré leur valeur nutritionnelle et l’intérêt des autorités de santé publique à les promouvoir.

5 recommandations pratiques pour guider les professionnels de santé et les parents

Au regard de cette analyse, les auteurs concluent qu’une part notable d’aliments préemballés commercialisés auprès des enfants n’ont pas un profil nutritionnel approprié et que les aliments sucrés y sont surreprésentés.
Pour pallier ce constat, les auteurs formulent cinq recommandations à destination des professionnels de santé et des parents concernant le choix des aliments préemballés pour les enfants (Robert, 2022) :

  • préférer les aliments étiquetés Nutri-Score A, B ou C ;
  • préférer les listes d’ingrédients les plus courtes, limiter la présence d’additifs et éviter les produits dont le premier ingrédient est «sucre»;
  • être conscient que le label «bio» peut offrir des produits avec un meilleur Nutri-Score mais n’est pas garant d’absence d’ultra-transformation;
  • être conscient que le marketing enfant ne correspond pas à une garantie de qualité nutritionnelle adaptée aux enfants mais plutôt à un incitant à l’achat par lattrait gustatif et hédonique ;
  • être conscient qu’il n’y a pas de différence entre les aliments sains pour les adultes et pour les enfants âgés de plus de 3 ans, à l’exception des ajustements de la texture et de la taille des portions adaptés à l’âge. Il n’est donc pas forcément utile de choisir des aliments marketés enfants.

Basé sur: Richonnet C., Mosser F., Favre E., Robert M., Martin F., Thiebaut I. Nutritional Quality and Degree of Processing of Children’s Foods assessment on the French Market. Nutrients, 2022, 14, 171.

Messages clés
  • La plupart des produits commercialisés pour les enfants sont des aliments sucrés, classés Nutri-Score D et E, ultra-transformés et non conformes aux critères du modèle européen de l’OMS.
  • Les produits Nutri-Score A sont sous-représentés, et la catégorie des fruits est principalement représentée par des compotes.
Méthodologie
Références
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