Consommation de fruits & légumes et espérance de vie en Europe

Une alimentation riche en fruits et légumes réduirait la mortalité Retour sur EPIC

La grande taille de la cohorte EPIC, sa longue période de suivi, la forte mortalité enregistrée et les variations considérables de consommations de fruits et légumes entre ses participants en font un sujet d’étude idéal.

451 151 participants, de 25 à 70 ans, ont été inclus, en provenance de 10 pays européens. Ils n’avaient aucun antécédent de maladies non transmissibles (cancer, AVC, diabète…). Ils ont été recrutés entre 1992 et 2000 et suivis jusqu’en 2010.

Une étude centrée sur la consommation de fruits et légumes

Notre étude s’est centrée sur la consommation de fruits (frais, séchés, en conserve), de légumes et leur association. Légumineuses, pommes de terre et tubercules ont été exclus. Les jus de F&L également car leur teneur nutritionnelle était variable (adjonction de sucre et de vitamines).

Notre étude avait deux objectifs :

  1. évaluer l’association entre la consommation de F&L et les taux de mortalité toutes causes, la mortalité due au cancer ou aux maladies cardiovasculaires dans le cadre de l’Etude Prospective Européenne sur l’alimentation et le Cancer EPIC
  2. évaluer la période pendant laquelle le risque de décès était repoussé dans le groupe à forte consommation de fruits et de légumes.

L’association entre la consommation de légumes et la mortalité a été comparée selon le mode de préparation (cru ou cuit).

Les rapports de risques ou Hazard Ratios (HR), l’allongement des périodes de vie et les proportions pouvant être prévenues, ont été estimés pour comparer les risques de mortalité entre les différents quartiles de consommation, estimer la durée pendant laquelle le risque de mortalité était retardé chez les forts consommateurs, et la proportion des décès qui pourrait être prévenue si tous les participants augmentaient leur consommation d’un quartile.

La consommation de F&L est associée à un plus faible risque de mortalité

  • Valeur médiane de la consommation de F&L observée en Europe : 387,9 g/jour
    Dans la population totale de l’étude, la valeur médiane observée de consommation combinée de fruits et légumes était de 387,9 g/jour et semblait augmenter selon un gradient Nord-Sud.

  • Les sujets âgés, les femmes et les personnes n’ayant jamais fumé consommaient plus de F&L que les autres
    En même temps qu’une forte consommation de fruits et légumes, les participants consommaient moins de viandes transformées et d’alcool.
  • Une forte consommation combinée de F&L inversement associée à la mortalité toutes causes
    Un risque de mortalité réduit de 11% a été retrouvé dans le quartile supérieur pour la consommation de fruits et légumes (>569 g/jour) comparé au quartile inférieur (<249g/jour), avec un risque de mortalité repoussé de 1,12 années. Pour toute augmentation de 200g/jour de la consommation combinée F&L, le risque de mortalité était réduit de 3-6%. Selon un modèle d’ajustement complet avec des « seuils » pour la consommation combinée de F&L, au-delà du seuil d’environ 400 g/jour de consommation, le risque de mortalité ne décroissait plus.
  • Une association inverse à la mortalité cardiovasculaire
    La consommation de F&L était inversement associée à la mortalité cardiovasculaire, avec un allongement de 1,37 années et une proportion évitable de 4,24%. Cependant, aucune relation inverse n’a été clairement observée avec la mortalité par cancer. Ceci peut être du à la plus longue période d’induction des cancers.
  • Consommation de fruits : inversement associée au risque de décès chez les femmes
    Tous les participants ayant une forte consommation de fruits avaient globalement un risque de mortalité légèrement réduit. Après stratification selon le sexe, cette association n’était retrouvée que chez les femmes. La proportion évitable serait de 2,13%.
  • Consommation de légumes : inversement associée au risque de mortalité toutes causes
    Le risque de mortalité était inversement associé à la consommation de légumes ; avec un hazard ratio de 0,90 et un allongement de 1,17 années pour les participants du quartile supérieur comparés à ceux du quartile inférieur (>312,1 vs. <106,8 g/jour). Aucune différence entre les sexes n’a été observée. La mortalité était réduite de 3% à 5% pour chaque augmentation de consommation de légumes de 100 g/jour.
  • Une plus forte association inverse pour les légumes frais que pour les cuits
    Quand la consommation a été stratifiée selon le mode de préparation, nous avons observé les associations inverses les plus fortes dans le quartile supérieur pour les légumes frais par rapport aux légumes cuits pour la mortalité toutes causes, par maladies cardiovasculaires ou par cancer. De plus, aucun effet de seuil n’a été détecté dans la relation inverse entre les légumes frais et la mortalité toutes causes confondues. La relation entre la consommation de légumes frais et un moindre risque de mortalité avait déjà été observée. Les mécanismes probables par lesquels la cuisson affecterait l’association entre les légumes et la mortalité incluraient les modifications de la disponibilité des nutriments, la destruction des enzymes digestives et l’altération de la structure et de la digestibilité des légumes.
  • Associations les plus fortes : les sujets ayant une forte consommation d’alcool ou un IMC élevé
    L’association inverse entre la consommation de F&L et la mortalité semblait la plus forte pour les participants ayant un IMC > 30 et avec une forte consommation d’alcool (>30 g/jour chez les femmes, >60 g/jour chez les hommes) ; elle a également été suggérée chez les fumeurs. Ce serait logique, vu les propriétés antioxydantes des fruits et légumes, car ces caractéristiques de vie augmentent le stress oxidatif. Des effets confondants ne peuvent être exclus, les participants consommant plus de fruits et légumes, ayant une meilleure santé selon d’autres facteurs que ceux évalués dans cette étude.

Max Leenders
Département de Gastro-entérologue et d’Hépatologie, Centre Médical Universitaire d’Utrecht, Pays-Bas
H. Bas Bueno-de-Mesquita
Institut National de Santé Publique et Environnement (RIVM), Bilthoven, Pays Bas
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