Les préférences alimentaires : rôle de la génétique et de l’environnement

Édito

Enfants et adolescents façonnent leurs préférences alimentaires selon un processus complexe influencé à la fois par des facteurs génétiques et environnementaux. Cette nouvelle édition expose trois points de vue concernant le rôle de la génétique dans les préférences alimentaires et l’obésité dans cette population. Joanne Cecil récapitule les liens entre le génotype et le phénotype comportemental dans le maintien de la balance énergétique et de l’obésité chez l’enfant. Selon elle, les individus présentent des différences génétiques et ont un impact sur leur susceptibilité et leur résistance à la prise de poids et à l’obésité. Les variations génétiques individuelles comprennent des polymorphismes génétiques communs (comme les variantes du gène FTO associées à la masse grasse et l’obésité), mais aussi les mutations au niveau d’un seul gène (plus rares), responsables des obésités monogéniques. Les polymorphismes génétiques prédisposent les enfants à des comportements alimentaires obésogènes en modifiant les voies de l’appétit. Les mutations monogéniques, entraînent une obésité sévère chez l’enfant et jouent sur la régulation de l’appétit en perturbant les mécanismes qui contrôlent la consommation d’aliments, ce qui altère la balance énergétique.

Andrea Smith et Claire Llewellyn expliquent que le goût pour différents aliments est façonné par des facteurs à la fois génétiques et environnementaux, à partir de données montrant que même les jumeaux n’ont pas des goûts identiques. Ainsi une étude réalisée en 2016 auprès de jumeaux a révélé que 54% des différences de préférences pour les légumes auraient une explication génétique à l’âge de 18-19 ans. L’impact génétique est moins important pour les autres types d’aliments : il explique seulement 32 % des goûts en matière de féculents chez les adolescents de 18-19 ans. Ces différences dans les préférences personnelles ne sont pas uniquement dues à des variations génétiques. L’environnement alimentaire des divers produits varie également considérablement avec les différentes formes de publicité, les opportunités de consommations diverses et les normes culturelles alimentaires.

Le rôle des parents pour créer un environnement positif afin d’inculquer des préférences saines aux enfants et adolescents, est également bien établi. Marion Hetherington expose comment favoriser la consommation de légumes lors de l’introduction des aliments complémentaires. Elle cite la méthode qui consiste à ajouter des légumes dans le lait ou le riz pour bébés. Ainsi, les enfants apprécient davantage les légumes et les consomment en plus grande quantité, ce qui crée des préférences saines dès le plus jeune âge.

Si la génétique joue effectivement un rôle dans l’obésité et les préférences alimentaires chez l’enfant et l’adolescent, les facteurs environnementaux sont également essentiels et peuvent largement être contrôlés. Nous pouvons modifier de nombreux facteurs environnementaux afin de créer des préférences alimentaires plus saines, par exemple en changeant les méthodes publicitaires, les occasions de consommer des aliments sains et les normes. Cette modification de l’environnement alimentaire serait positive non seulement pour les enfants et les adolescents, mais aussi pour la population dans son ensemble. À l’heure actuelle, être en surpoids est « normal » au Royaume-Uni, où 61,7 % des adultes présentent une surcharge pondérale ou une obésité. La modification des facteurs environnementaux, notamment en augmentant la consommation de fruits et légumes, aidera à réduire durablement cette statistique inquiétante.

Jason Halford
Responsable « Santé, Comportement et Consommation » du programme N8-Agrifood Université de Liverpool, ROYAUME-UNI
Christian Reynolds
Centre for Food Policy City, University of London, ROYAUME-UNI
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