Alimentation saine : priorité aux premières années de la vie

Quel impact des bonnes pratiques en matière de repas dans les crèches aux États-Unis sur la consommation d’énergie, de fruits et de légumes ?

La petite enfance est une période déterminante pour la prévention de l’obésité, puisque à la fois les habitudes alimentaires et les courbes de croissance s’établissent pendant cette période de la vie. Les données indiquent que les enfants en surpoids/obèses pendant les premières années de leur vie, ont un risque cinq fois plus élevé de l’être à l’âge adulte 1.

Les crèches : un environnement clé pour la prévention de l’obésité

Dans ce contexte, les crèches sont un environnement clé pour les efforts de prévention de l’obésité. 61 % des enfants d’âge préscolaire (3 à 6 ans) 2 sont inscrits en crèche, où ils passent en moyenne 33 heures par semaine 3 et consomment jusqu’à deux tiers de leur apport calorique journalier 4.

Les meilleures pratiques recommandées pour les repas en crèche en vue d’appuyer la prévention de l’obésité sont présentées dans le programme Nutrition and Physical Activity Self-Assessment for Child Care (NAP SACC, auto-évaluation de l’alimentation et l’activité physique en crèche) 5. Répertoriées ci-dessous, ces bonnes pratiques ont été formulées sur la base d’études expérimentales et d’après l’avis des spécialistes. Avant la nôtre, peu d’études ont examiné la mise en oeuvre de ces pratiques dans la vie réelle. .

Meilleures pratiques recommandées pour les repas en crèche

  1. Le personnel sert les repas de manière familiale (l’enfant se sert lui-même).
  2. Le personnel passe le repas à table avec les enfants.
  3. Le personnel mange la même nourriture que les enfants.
  4. De manière informelle, le personnel discute avec les enfants de l’alimentation saine.
  5. Le personnel encourage les enfants à goûter des aliments nouveaux ou moins appréciés.
  6. Le personnel aide les enfants à déterminer s’ils ont encore faim avant de se resservir.

Une étude dans 30 crèches sélectionnées au hasard

Nous souhaitions décrire le respect des bonnes pratiques en matière de repas dans les crèches et évaluer le lien entre les pratiques adoptées et les aliments consommés par les enfants. Pour ce faire, nous avons sélectionné au hasard 30 crèches du comté d’Hamilton, dans l’Ohio pour participer à une étude d’observation des activités physiques et de l’environnement nutritionnel en crèche, intitulée « Preschool Eating and Activity Study » (PEAS) 6. Les données ont été recueillies entre novembre 2009 et janvier 2011. Pour être inclus dans l’étude, les enfants devaient être âgés de 36 à 72 mois. Dans chaque crèche, deux classes étaient choisies au hasard. Trois observateurs étaient postés dans chaque classe : deux pour étudier l’alimentation de trois enfants pendant le déjeuner, le 3e consignait les pratiques adoptées pendant les repas et le comportement du personnel. Pour évaluer le lien entre les comportements pendant les repas et les aliments consommés par les enfants, nous avons utilisé des modèles linéaires à effets mixtes généraux, dans lesquels la crèche était un effet aléatoire.

Comment sont respectées les bonnes pratiques en matière de repas

Le respect des bonnes pratiques en matière de repas était variable. Le tableau 1 montre la fréquence à laquelle chaque bonne pratique était respectée dans les crèches étudiées.

Alimentation associée aux bonnes pratiques : des résultats variables

Les enfants consommaient en moyenne 349 kcal, 0,4 portions de légumes et 0,5 portions de fruits lors des déjeuners observés.

Consommation d’énergie (apport calorique total) : quand le personnel était assis à table avec les enfants pendant le repas, la consommation d’énergie était inférieure (313 contre 368 kcal, p = 0,04). Lorsque le personnel mangeait en partie les mêmes aliments que les enfants, la consommation d’énergie augmentait (375 contre 309 kcal, p = 0,008).

Consommation de fruits : la bonne pratique consistant à encourager les enfants à goûter des aliments nouveaux ou moins appréciés a eu un effet mitigé sur la consommation de fruits. En effet, lorsque les enfants étaient encouragés une seule fois, une augmentation non significative de la consommation de fruits était observée (de 0,5 à 0,7 portions). En revanche, l’incitation répétée était associée à une consommation significativement inférieure de fruits (de 0,7 à 0,4 portions, p = 0,008).

Consommation de légumes : deux bonnes pratiques en matière de repas étaient associées à une augmentation de la consommation de légumes : le fait que le personnel passe les repas à table avec les enfants (0,5 contre 0,3 portions, p = 0,03) et qu’il mange en partie les mêmes aliments que les enfants (0,4 contre 0,3 portions, p = 0,04).

En revanche, le service selon un style familial et le fait de parler d’une alimentation saine n’ont pas eu d’impact significatif sur la consommation de fruits, de légumes et de calories totales.

Des efforts nécessaires pour améliorer le respect des bonnes pratiques

Notre étude était la première observation directe de l’environnement des repas en crèche et de l’alimentation des enfants aux États-Unis. Nous avons démontré que le respect de chaque bonne pratique en matière de repas varie considérablement d’une crèche à l’autre et que peu ont des répercussions sur les aliments consommés. Étant donné le nombre d’heures que de nombreux enfants passent en crèche, il est essentiel de cibler ces établissements pour les efforts de prévention. Des études supplémentaires sont nécessaires afin d’identifier les pratiques et comportements modifiables qui ont des impacts positifs sur l’alimentation des enfants. Ces recherches sont essentielles pour améliorer l’environnement des repas en crèche et pour ralentir l’épidémie d’obésité chez l’enfant.

Roohi Y. Kharofa
Cincinnati Children’s Hospital Medical Center, USA
Kristen A. Copeland
Cincinnati Children’s Hospital Medical Center, USA
  1. Whitaker RC, Wright JA, Pepe MS, et al. Predicting Obesity in Young Adulthood from Childhood and Parental Obesity. N Engl J Med. 1997;337(13):869-873.
  2. Federal Interagency Forum on Child and Family Statistics. Child Care: Percentage of Children Ages 3–6, Not yet in Kindergarten, in Center-Based Care Arrangements by Child and Family Characteristics and Region. 2014; http://www.childstats.gov/americaschildren/ tables/fam3b.asp. Accessed 18 November.
  3. Laughlin L. Who’s Minding the Kids? Child Care Arrangements: Spring 2011. Current Population Reports. Washington, DC: U.S. Census Bureau; 2013:70-135.
  4. Benjamin Neelon SE, Briley ME, American Dietetic Association. Benchmarks for Nutrition in Child Care. J Am Diet Assoc. 2011;111(4):607-615.
  5. Battista RA, Oakley H, Weddell MS, et al. Improving the Physical Activity and Nutrition Environment through Self-Assessment (Nap Sacc). Prev Med. 2014;67 (1):10-16.
  6. Robson SM, Khoury JC, Kalkwarf HJ, et al. Dietary Intake of Children Attending Full- Time Child Care. J Acad Nutr Diet. 2015; 2212-2672 (Electronic).
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