Rôle des fruits & légumes dans la prévention de l’asthme et des allergies

Fruits et légumes et maladies pulmonaires : une nouvelle piste, la lutéine

Dans le monde, des centaines de millions de personnes souffrent de maladies respiratoires dont l’asthme et la BPCO (Broncho Pneumopathie Chronique Obstructive). L’asthme est particulièrement fréquent chez l’enfant et l’adulte. Sa prévalence ne cesse de croitre. De multiples facteurs socio économiques et de mode de vie ont été associés à son développement. Des facteurs nutritionnels, comme les vitamines A, D et E, pourraient jouer un rôle important dans sa pathogénèse. La BPCO se caractérise par une réduction de la capacité respiratoire associée à une inflammation des voies respiratoires liée au tabac ou à la pollution.

La fonction pulmonaire décline avec l’âge et est un prédicteur indépendant de la mortalité. Une augmentation du stress oxydant a été incriminée dans la pathogénie de l’asthme et de la BPCO. A coté du tabac et de diverses mutations génétiques, la pauvreté de l’alimentation en antioxydants, comme les caroténoïdes, présents dans les F&L, pourrait être en cause dans le développement de ces pathologies respiratoires.

La lutéine: un puissant caroténoïde antioxydant

Les études de supplémentations en ß-carotène ont abouti à des résultats déconcertants. Il est donc intéressant de s’intéresser aux effets d’autres caroténoïdes sur la santé respiratoire.

Un des plus puissants caroténoïdes antioxydants, la lutéine, est principalement apporté par les légumes à feuilles et les oeufs. La lutéine est surtout connue pour ses effets protecteurs sur la rétine. De tels effets pourraient également ralentir le déclin de la fonction respiratoire… Jusqu’à présent peu d’études se sont intéressées à cette question.

C’est ainsi qu’une équipe de chercheurs hollandais, britanniques et belges ont publié récemment une revue de la littérature afin d’évaluer les associations entre la lutéine (apports alimentaires, supplémentation, taux plasmatiques) et la santé respiratoire au cours de la vie. A partir de nombreuses bases de données scientifiques (comme Medline, Embase, Cochrane etc…) les études portant sur ce sujet entre 2001 et 2013 (études transversales, cas-témoins, de cohortes et d’intervention) ont été collectées.

Après sélection, en fonction d’un score de qualité (QS) de 0 à 10, seulement 13 articles – sur plus de 4000- ont été retenus pour cette revue rassemblant près de 17 000 sujets: une seule étude contrôlée randomisée, les autres étant des études observationnelles (6 transversales, 4 prospectives et 2 études longitudinales). Deux études portaient sur la broncho dysplasie pulmonaire (BDP), 5 sur l’asthme, 5 sur la fonction respiratoire et 1 sur la mortalité pulmonaire.

La lutéine est associée à un plus faible risque de mortalité pulmonaire

Une seule étude, avec un score de qualité de 6, a montré que la lutéine était associée à un plus faible risque de mortalité pulmonaire. En outre, des études d’observation (QS de 6 et 9) ont retrouvé une relation positive entre la lutéine et la fonction respiratoire.

Concernant l’asthme, une seule étude (QS=4) a retrouvé, en analyse brute, de plus faibles niveaux sanguins de lutéine/zéaxanthine chez les patients asthmatiques par rapport à ceux qui ne l’étaient pas, à l’inverse de 4 autres études…

Aucune différence n’a été notée entre les taux plasmatiques de lutéine à la naissance entre les nouveaux nés présentant une broncho dysplasie pulmonaire ou pas, alors que dans l’étude randomisée (QS=8) la lutéine semblait associée au risque de BDP chez les nouveaux nés.

Au final, les auteurs soulignent le petit nombre d’études de qualité sur le sujet. En outre, les effets de la lutéine sur la BPCO n’ont pas encore été étudiés.

Vers des recommandations sur les apports journaliers en lutéine ?

Les associations retrouvées entre lutéine, fonction et mortalité respiratoire peuvent être certainement expliquées par des mécanismes antioxydants. Quoi qu’il en soit, les études publiées suggèrent une possible relation entre la lutéine et l’amélioration globale de la fonction pulmonaire. Même s’il n’existe pas actuellement de recommandations officielles sur les apports journaliers recommandés en lutéine, des études révèlent que chez l’adulte des apports supérieurs à 2000μg en lutéine/zéaxanthine sont significativement associés à une amélioration des fonctions respiratoires.

Il faut certainement prendre en compte l’importance d’autres micronutriments que la lutéine dans la genèse des pathologies respiratoires, même si les études sur le sujet sont en faveur du rôle possible d’un apport élevé en ce puissant caroténoïde antioxydant sur la fonction respiratoire. De vastes études prospectives de cohortes sont à présent nécessaires pour analyser plus finement ces résultats prometteurs.

Thierry Gibault
Nutritionniste, endocrinologue, Paris - FRANCE
D. Melo van Lent et al./ Clinical Nutrition ESPEN 13 (2016) e1-e7, the effects of lutein on respiratory health across the life course: A systematic review.
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