Politiques nutritionnelles et fruits & légumes

Politiques nutritionnelles en Europe : Quelles sont les mesures existantes ?

Des interventions visant à améliorer l’alimentation de la population générale ont récemment été intégrées à l’agenda gouvernemental de la majorité des pays Européens. Ainsi, le programme EATWELL a publié une classification des politiques de santé publiques existantes cherchant à modifier les comportements alimentaires. Les mesures ont été réparties en deux groupes, selon qu’elles favorisent des choix mieux informés ou qu’elles modifient l’environnement alimentaire.

Les actions les plus courantes en matière d’alimentation saine

En grande majorité, les mesures adoptées par l’Union Européenne (UE) facilitent les choix mieux informés. Dans cette catégorie, les mesures pour contrôler la publicité, sont courantes en Europe (comme la loi Française sur la publicité alimentaire et l’interdiction de publicités pour des aliments malsains auprès des enfants au Royaume-Uni). Leur objectif : protéger les mineurs en limitant l’heure de diffusion et le contenu des publicités télévisuelles.

Les campagnes publiques d’information et d’éducation alimentaire sont de loin les actions les plus courantes en matière d’alimentation saine. Elles utilisent aussi bien le marketing social que les supports éducatifs (séances de formation, ateliers, conférences,…) pour améliorer les connaissances et faire prendre conscience des bénéfices d’une alimentation saine. Elles peuvent traiter de l’alimentation dans sa globalité ou se focaliser sur certains aliments (par exemple : la campagne pour réduire le sel dans l’alimentation au Royaume Uni ou les campagnes « 5 par jour » pour la promotion de la consommation de fruits et légumes). L’étiquetage des produits alimentaires fait également partie de cette catégorie, bien que s’il existe une réglementation européenne à ce sujet (Directive Européenne 90/496/EEC), peu de lois nationales ont été adoptées dans ce domaine (quelques exemples notables sont le logo ‘trou de serrure’ adopté en Suède, en Norvège et au Danemark, et le logo « coeur » en Finlande).

L’information nutritionnelle sur les menus contribue également à l’information des consommateurs. Cependant, à part quelques cas où les informations nutritionnelles sur les menus de restaurants ou de cafétérias font partie de campagnes d’information ou d’étiquetage plus larges (comme la Plateforme Portugaise contre l’obésité ou le Trou de Serrure Suédois), aucune intervention spécifique n’a été identifiée en Europe.

Interventions les plus débattues en Europe : les mesures fiscales

Au sein des politiques centrées sur l’environnement alimentaire, celles concernant les repas à l’école (interdictions des distributeurs dans les écoles en Angleterre et en France, offre de fruits dans le cadre du programme Européen de Fruits à l’Ecole) et les actions gouvernementales visant à encourager l’implication du secteur privé (comme l’engagement volontaire de réduire la teneur en matières grasses saturées et en sel dans les aliments industriels au Royaume–Uni) sont les plus fréquentes.

Les mesures fiscales (taxes ou subventions) conçues pour modifier les prix des aliments sains et malsains sont probablement les interventions nutritionnelles les plus débattues en Europe. Nombre de pays Européens ont récemment adopté une taxe sur certains aliments « malsains » (au Danemark, sur les matières grasses saturées, en Hongrie sur les aliments riches en sel et en sucres, en France sur les boissons sucrées caloriques et en Finlande sur les bonbons). Les standards nutritionnels font partie des interventions sur l’environnement alimentaire. Cependant, l’interdiction au Danemark des acides gras trans artificiels est la seule norme obligatoire sur la composition nutritionnelle des aliments en Europe. Il y a également très peu de programmes visant à augmenter l’accès aux aliments sains pour les consommateurs défavorisés (deux programmes ont été identifiés en Ecosse et au Danemark).

Efficacité des politiques ? Des carences d’évaluations

Outre les campagnes d’information, il n’existe que quelques actions de santé publique concertées et systématiques en faveur d’une nutrition saine dans les pays Scandinaves et au Royaume-Uni, avec un démarrage récent en France. Les pays Méditerranéens n’ont qu’une histoire récente d’actions de santé publique, limitées surtout aux mesures d’information et d’éducation. Il existe quelques évaluations de l’impact des politiques nutritionnelles en Europe, mais, dans la plupart des cas, elles ont d’importantes carences (elles se limitent aux changements d’attitudes et non des comportements ; elles n’intègrent pas les facteurs confondants pouvant moduler leur impact).

Cependant, les évaluations existantes suggèrent que l’étiquetage nutritionnel et la réglementation des publicités pour enfants engendrent une réponse comportementale positive 1,2. L’impact des campagnes d’information sur les attitudes et les intentions serait également significatif, tandis que l’effet sur les comportements serait plutôt limité 3. Concernant les mesures fiscales, les preuves suggèrent que les taxes mineures entraîneraient des réponses comportementales mineures et que les taxes majeures auraient un impact significatif sur la consommation alimentaire et la santé 4,5.

Sara Capacci
Département de Statistiques, Université de Bologne, Italie, au nom du consortium EATWELL
Capacci S, Mazzocchi M, Shankar B, Brambila-Macias J, Verbeke W, Pérez-Cueto FJA, Kozioł-Kozakowska A et al. Policies to promote healthy eating in Europe: a structured review of policies and their effectiveness. Nutrition Reviews 2012;70:188–200.
  1. Cowburn G, Stockley L Consumer understanding and use of nutrition labelling: a systematic review. Public Health Nutrition 2007;8:21-28.
  2. Dhar T, Baylis K Fast-food consumption and the ban on advertising targeting children: the Quebec experience. Journal of Marketing Research 2011;48:799-813.
  3. Pomerleau J, Lock K, Knai C, Mckee M Interventions designed to increase adult fruit and vegetable intake can be effective: A systematic review of the literature. Journal of Nutrition 2005;135:2486-2495.
  4. Mytton O, Gray A, Rayner M, Rutter H Could targeted food taxes improve health? Journal of Epidemiology and Community Health 2007;61:689.
  5. Fletcher JM, Frisvold D, Teff t N Can soft drink taxes reduce population weight? Contemporar y Economic Policy 2010;28:23-35.
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