Italie : les régimes alimentaires actuels sont moins durables que l’alimentation méditerranéenne traditionnelle

8 décembre 2022

Les systèmes alimentaires sont à l’origine de plus d’un tiers des émissions globales de gaz à effet de serre (FAO, 2021). A l’occasion de la journée mondiale du climat, Aprifel revient sur une récente étude italienne ayant évalué les effets de l’alimentation actuelle des Italiens en termes d’’environnement. Ce travail montre que les Italiens s’éloignent progressivement de l’alimentation méditerranéenne traditionnelle et ont ainsi une alimentation moins durable qu’auparavant. Cette étude invite une nouvelle fois à faire évoluer nos systèmes alimentaires au bénéfice de la santé, de l’environnement et de la lutte contre le changement climatique.

Le régime méditerranéen est reconnu pour ses bienfaits sur la santé, mais également pour ses bénéfices sur l’environnement et la société (Castaldi, 2022). Ces dernières années, de nombreux pays du bassin méditerranéen abandonnent, pourtant, progressivement les principes de l’alimentation méditerranéenne au profit d’un régime occidentalisé – consommation accrue de viande et produits sucrés, en parallèle d’une réduction des consommations de fruits et légumes, céréales, complexes ou encore légumineuses (Vilarno, 2019). Dans ce contexte, l’étude de Vinci et coll, 2022 a évalué les impacts de la moindre adhésion des Italiens au régime méditerranéen en termes d’environnement à travers analyse de cycle de vie (voir encadré) et une estimation de l’empreinte carbone (voir méthodologie).

Des consommations excessives de viande, pâtisseries et produits sucrés

Alors qu’elle est l’un des symboles du régime méditerranéen, l’alimentation des Italiens s’éloigne des principes portés par ce modèle. Ainsi, le travail de Vinci et coll. révèle que les Italiens consomment en moyenne 3503 kcal/personne/jour soit +75% de l’apport calorique quotidien recommandé par le régime méditerranéen. Ces résultats s’expliquent notamment par une consommation nettement plus importante de viande et de produits carnés, de pâtisseries et de produits sucrés.

+234%

de consommation de viande et de produits carnés

+246%

de consommation de pâtisseries

+584%

de consommation de produits sucrés

Enfin, les consommations actuelles de fruits et légumes sont inférieures de 41% et de 24% respectivement aux recommandations du régime méditerranéen (voir figure ci-dessous).

Figure 1 : Comparaison de la composition du régime italien actuel avec le modèle méditerranéen (d’après Vinci et coll, 2022)

Un impact plus grand sur l’environnement

Sur cette base, les auteurs ont ensuite évalué les conséquences de cet éloignement de l’alimentation méditerranéenne au travers de différentes catégories d’impacts environnementaux. Pour cela, une analyse comparative de cycle de vie (voir encadré) ainsi qu’une évaluation de l’empreinte carbone ont été réalisées.

En raison de la consommation élevée de produits d’origine animale, le régime actuel présente un impact sur l’environnement supérieur de 133% par rapport au régime méditerranéen. Les différences les plus significatives concernent :

  • Utilisation des terres : +145%
  • Eutrophisation marine : +135%
  • Impact du réchauffement climatique sur les écosystèmes terrestre et d’eau douce : +127%
  • Impact de la consommation d’eau sur l’écosystème aquatique : +123%

Concernant l’empreinte carbone, cette étude indique que les habitudes alimentaires des Italiens génèrent une empreinte carbone totale supérieure de +142% par rapport au régime méditerranéen (voir figure ci-dessous).

Figure 2 : Comparaison de l’empreinte carbone (en kg eq. CO2) du régime italien actuel avec le modèle méditerranéen (d’après Vinci et coll, 2022)

Des effets sur l’environnement qui affectent la santé et l’économie

Sur la base de l’analyse des conséquences des régimes alimentaires italiens sur l’environnement, les auteurs ont également estimé les conséquences de ces impacts environnementaux en termes de santé et d’économie.

Les consommations actuelles des Italiens contribuent davantage (+100%) aux impacts environnementaux affectant la santé humaine que le régime méditerranéen. Parmi ces impacts, bon nombre participent à l’accélération du réchauffement climatique et donc à la détérioration des conditions de vie (Trisos, 2020).

Enfin, la contribution du régime actuel à la raréfaction des ressources minérales et fossiles – et donc aux coûts générés – est plus importante (+59%) que celle du modèle méditerranéen. D’après ce travail, adhérer aux recommandations du régime méditerranéen permettrait, ainsi, d’économiser 53$ de ressources annuelles par personne, soit un total de 3,2 milliards de dollars par an.

Améliorer la durabilité des régimes et promouvoir le respect de l’environnement de la production à la consommation

Face à ce constat, les auteurs insistent sur l’importance d’améliorer la durabilité des régimes et de promouvoir le respect de l’environnement de la production à la consommation, conformément à la stratégie européenne « de la Ferme à la Fourchette”.

Pour favoriser cette transition alimentaire, les auteurs recommandent aux politiques de s’inspirer du modèle méditerranéen. Ils suggèrent également aux futurs travaux de tenir compte des répercussions sociales afin d’évaluer de façon globale la durabilité et la qualité du régime alimentaire.

Analyse Cycle de Vie 

L’analyse du cycle de vie est une méthode d’évaluation globale et multicritères des impacts environnementaux d’un service ou d’un produit au fil de son existence (de la conception jusqu’à la gestion de sa fin de vie). Elle permet de recenser et de quantifier les flux d’énergie et de matière associés aux activités humaines et constitue ainsi un outil robuste dans le cadre d’une démarche d’éco-conception. Les principes, les exigences et les modalités de l’analyse du cycle de vie sont définis par les normes internationales ISO 14040 et ISO 14044 (ADEME, 2018).

Méthodologie
  • Une analyse du cycle de vie a été utilisée pour évaluer la contribution des consommations alimentaires des Italiens en 2019 à différentes catégories d’impacts environnementaux par rapport aux recommandations du régime méditerranéen. Les catégories d’impacts ont été divisées en 3 macro-domaines : environnement, santé humaine et économie
  • Les étapes prises en compte dans l’analyse sont les suivantes : production, transformation industrielle, fabrication, transport, conditionnement, de la vente au détail et consommation. L’élimination des déchets alimentaires a été exclue de l’étude.
  • Bases de données utilisées : Agribalyse v3.0.1, Ecoinvent v3.8, et World Food LCA Database (WFLDB) v3.5.
  • L’unité fonctionnelle choisie est 14 000 kcal, soit l’apport calorique hebdomadaire recommandé pour un adulte de poids normal dont les besoins quotidiens s’élèvent à environ 2000 kcal/jour.
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