Evolution des tendances de consommation alimentaire dans différents pays

Comparaison des tendances nutritionnelles liées à l’âge en France

Depuis une quarantaine d’années, en Europe, les habitudes alimentaires régionales et nationales ont changé dans le sens d’une alimentation « Occidentale » plus homogène. C’est particulièrement vrai en France où deux styles traditionnels d’alimentation s’opposent: le régime méditerranéen (à base de légumes secs, fruits, légumes verts, céréales et poissons) et le régime des régions du Nord (à base de viandes, de lait et de produits laitiers).

Deux enquêtes nutritionnelles successives

Afin d’examiner les tendances alimentaires et le style d’alimentation en France, notre étude a comparé les résultats des deux enquêtes Individuelles Nationales des Consommations Alimentaires (INCA) : INCA1 (1997-1998) et INCA2 (2006-2007). Les participants à ces enquêtes ont tenu un journal alimentaire, rapportant tout ce qu’ils avaient bu ou mangé durant 7 jours consécutifs. Les chercheurs ont ensuite évalué les apports alimentaires et nutritionnels en fonction de 38 groupes d’aliments différents. Ils ont évalué la fréquence de consommation et l’apport énergétique moyen selon l’âge, le sexe, la région et le statut socio-économique. C’est la première fois, en France, que des chercheurs ont eu accès à deux enquêtes nutritionnelles successives, utilisant la même méthodologie. Ainsi, ils ont pu suivre sur 8 années l’évolution nationale de l’alimentation et des apports nutritionnels.

Augmentation de consommation des fruits et légumes

Plusieurs tendances ont émergé de la comparaison des résultats des deux enquêtes. Quelque soit l’âge, une des plus apparentes était la diminution globale de la consommation de produits laitiers, de viande, de pain, de pommes de terre, de pâtisseries et de confiseries (sucres). A l’inverse, on a noté une augmentation de la consommation de fruits et légumes, de riz, de crème glacée et de chocolat. Entre les deux enquêtes, la consommation de fruits frais, demeurée stable chez les jeunes, a en revanche fortement augmenté chez les adultes à la cinquantaine (+48.4% chez les femmes et +37,8% chez les hommes) et les femmes âgées (+23,4%). La consommation de légumes est restée stable chez les adultes à la cinquantaine et les hommes âgés alors qu’elle a augmenté chez les femmes âgées (+15,0%) et diminué chez les hommes jeunes (-13,8%).

Impact de l’âge sur les choix alimentaires

Même si un certain nombre d’habitudes alimentaires ont changé, l’apport énergétique moyen est resté stable. En revanche, l’apport des différents macronutriments a varié. L’énergie provenant des protéines a diminué chez les femmes et les hommes à la cinquantaine. Chez les hommes les plus âgés, l’apport calorique issu des glucides a diminué tandis que celui des lipides a augmenté. On a constaté l’inverse chez les plus jeunes.

La consommation de vitamine C et de folates a augmenté à tout âge ; celle de sodium a diminué partout à l’exception des jeunes femmes.

Les deux enquêtes INCA1 et INCA2 ont examiné l’impact de l’âge sur les choix alimentaires. Les différences étaient constantes durant les huit années. Dans les deux enquêtes, les plus âgés s’alimentaient d’une manière traditionnelle, bien Française – à base de pain, de poisson, de fruits et légumes, de sucreries/confiseries, de soupes et de fromages. Les jeunes ont plutôt adopté un régime Occidental, à base de « collations et de restauration rapide » et caractérisé par des pâtes, du riz, des pâtisseries, du lait, du chocolat, des pizzas, de la viande (chez les hommes) et de la crème glacée (chez les femmes). La même répartition selon l’âge a été observée dans les deux enquêtes.

Des facteurs économiques pourraient jouer un rôle

Durant ces huit années, l’évolution de l’alimentation a été en cohérence avec les recommandations du premier PNNS – Programme National de Nutrition et de Santé – lancé en 2001. La consommation de pain, de lait et de sucre a baissé ; celle de fruits et de riz a augmenté. La consommation de légumes et de fromages est restée stable. L’accent mis sur la promotion d’une alimentation saine pourrait expliquer ces changements de tendance. Des facteurs économiques pourraient également jouer un rôle. Les données de l’Institut National de Statistiques et d’Etudes Economiques (INSEE) montrent une augmentation globale de 17,0 % du prix des aliments entre 1998 et 2006. Ce sont le pain et la viande rouge qui ont connu les plus fortes hausses, alors que les prix des autres aliments sont restés relativement stables.

Globalement, cette étude souligne plusieurs changements dans l’alimentation française depuis 1998-99. Ils suivent les mêmes tendances que celles des pays du Nord de l’Europe. Si ces changements sont intéressants, il est important de noter que les tendances des habitudes alimentaires n’ont qu’un faible impact sur les apports nutritionnels.

Carine Dubuisson
Agence Nationale de Sécurité Sanitaire de l’alimentation, de l’environnement et du travail (ANSES), Direction de l’Evaluation des Risques – Domaine « Méthodologie et Observatoires », Unité « Observatoire des consommations alimentaires », FRANCE
  • Dubuisson et al. Trends in food and nutritional intakes of French adults from 1999 to 2007: results from the INCA surveys. Br J Nutr. 2010 Apr;103(7):1035-48.
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