Menu végétarien à la cantine : où en est l’expérimentation ?

10 février 2022

Menu végétarien à la cantine - assiette de lentilles et de légumes

Depuis novembre 2019, la restauration scolaire doit proposer, au moins une fois par semaine aux enfants, un menu dit « végétarien ». Par ce biais, l’objectif des pouvoirs publics est « de favoriser la diversité de notre alimentation et de réapprendre aux différents publics – en particulier aux plus jeunes – à apprécier les légumes secs (lentilles, haricots secs, pois chiches etc) ». A l’occasion de la journée mondiale des légumineuses, Aprifel fait le point sur les travaux en cours à ce sujet.

Afin d’encourager des habitudes alimentaires saines et d’assurer aux enfants des repas répondant à leurs besoins nutritionnels, la restauration scolaire fait l’objet d’un encadrement réglementaire spécifique (voir encadré). Les textes actuels ne prévoyant pas l’encadrement de la mise en place des menus végétariens, c’est-à-dire sans viande, poisson ou fruits de mer, la pérennisation de cette mesure nécessite notamment une réadaptation du cadre réglementaire.

Réfléchir collectivement aux bonnes pratiques pour la mise en place du menu végétarien hebdomadaire

Cette mission a été confiée au CNRC et plus spécifiquement à son groupe de travail « Nutrition » (voir encadré), dont Aprifel est membre. Cette instance est notamment chargée de poser le cadre de la mise en œuvre opérationnelle de cette nouvelle elle mesure et d’accompagner les acteurs de terrain dans son déploiement.
Les premiers travaux du groupe ont consisté à développer des outils d’accompagnement pour aider les collectivités à mettre en place cette expérimentation. En juillet 2020, un premier guide pour l’expérimentation d’un menu végétarien a ainsi été publié par le CNRC. En parallèle, le groupe s’est attaché à étudier la composition nutritionnelle des menus végétariens proposés en restauration scolaire et leur adéquation avec les besoins des enfants. Ces travaux se sont fondés sur plusieurs expertises de l’Anses et sur un premier appui scientifique et technique dédié aux menus végétariens en restauration scolaire.

Approfondir les recommandations pour assurer la qualité nutritionnelle des repas servis

Afin de compléter et approfondir ces premières recommandations, un deuxième appui scientifique et technique a été demandé à l’Anses. Il s’agissait, cette fois-ci, notamment de déterminer les fréquences recommandées en restauration scolaire que ce soit concernant ce type de menu en lui-même, mais aussi celles (maximales ou minimales) pour différents types de plats végétariens.

Les résultats de ce travail ont été publiés en novembre 2021. Ils indiquent qu’un menu végétarien hebdomadaire en restauration scolaire peut contribuer à la couverture de l’ensemble des besoins des enfants, à la condition qu’il soit équilibré et que l’offre végétarienne prenne mieux en compte l’intérêt des apports en légumineuses et céréales complètes.

L’Anses considère également que l’augmentation du nombre de menus sans viande ni poisson, sous réserve de la condition ci-dessus, ne modifie pas l’équilibre nutritionnel des enfants. Pour l’Agence, il n’est donc pas pertinent de proposer une fréquence maximale de tels menus.

Des travaux complémentaires nécessaires pour mieux prendre en compte tous les enfants

L’Anses tempère toutefois ces conclusions en soulignant plusieurs limites à son travail notamment liées à des données insuffisantes :

  • L’évaluation des apports liés aux repas pris à la cantine se fonde sur des simulations d’apports moyens estimés et non sur les quantités réellement consommées.
  • L’estimation des apports liés aux repas pris en dehors de la cantine utilise les données moyennes issues de l’étude Inca 3, sans distinguer les jours avec et sans cantine.
  • Enfin, la variabilité entre enfants n’a que faiblement pu être prise en compte que ce soit concernant leurs besoins nutritionnels ou les quantités et types d’aliments consommés.

L’Agence souligne, ainsi, que pour réaliser une évaluation des risques chez des enfants de profils particuliers (par ex. les petits mangeurs, les enfants issus de classes sociales défavorisées, des deux sexes et de différentes classes d’âge), il serait nécessaire de disposer de données récentes de consommation, spécifiques à ces populations, recueillies auprès d’enfants fréquentant une cantine scolaire depuis le début de l’expérimentation.

Enfin, l’Agence souligne également que cette expertise pointe des enjeux nutritionnels déjà bien identifiés et dépassant le sujet de la restauration scolaire.

« Ce travail montre à nouveau chez les enfants des apports journaliers très élevés en protéines quelle que soit leur origine, des apports excessifs en acides gras saturés et en sodium, et des apports insuffisants en acides gras omégas 3 et en vitamine D. » (Anses 2021).

Au-delà de la qualité des menus servis en restauration scolaire, c’est bien toute l’alimentation des enfants qu’il convient d’améliorer.

Acceptabilité du plat végétarien à la cantine : un démarrage difficile mais des leviers d’amélioration identifiés

En parallèle de ces travaux, le CGAAER a réalisé une évaluation de l’expérimentation du menu végétarien hebdomadaire en restauration collective scolaire.
Les résultats de ce travail ont été publiés en mars 2021. Ils font état d’un démarrage difficile de l’expérimentation lié à divers freins : réticences initiales d’une partie de l’opinion publique, manque de préparation de certains opérateurs, difficultés liées à la préparation des repas et à l’approvisionnement, sans compter la crise sanitaire. De même un gaspillage important a pu être observé au début de l’expérimentation, sans que cela soit une tendance générale.
Malgré ces difficultés initiales, les auteurs de ce travail notent une tendance à l’amélioration au fil de l’expérimentation, des facteurs favorables et pistes de progrès identifiées. Les recommandations issues de cette mission d’enquête invitent notamment à :

  • Former et accompagner les chefs. Renforcer la formation initiale des chefs en introduisant des modules spécifiques dans les référentiels pour les bac-pro et BTS cuisine, et faciliter leur accès à la formation continue
  • Faciliter l’approvisionnement en produits végétaux de qualité ; favoriser le « fait-maison » plutôt que l’utilisation d’aliments « prêts à l’emploi »
  • Assurer l’accompagnement pédagogique de la mesure auprès des enfants, de leurs parents et les personnels concernés pour conforter l’acceptabilité de la mesure.

Sur la base de ces différents éléments d’éclairage, le groupe de travail « Nutrition » du CRNC poursuit ses travaux notamment pour croiser ces éléments avec la réalité du terrain et la faisabilité pour les opérateurs.

La restauration scolaire : levier d’amélioration des habitudes alimentaires des enfants

 

En France, 75% des enfants, quel que soit le niveau scolaire, et 58% des enfants de maternelle et primaire déjeunent à la cantine au moins quatre jours par semaine (Anses, Inca 3). Influer sur l’approvisionnement et la qualité nutritionnelle des repas servis sont ainsi des leviers importants pour améliorer les habitudes alimentaires. Afin de garantir la qualité nutritionnelle des repas servis, la réglementation fixe les composantes des repas servis en restauration scolaire ; la taille des portions servies, ainsi que la fréquence à laquelle les plats et types d’aliments peuvent être proposés au cours de 20 repas successifs.

Pour les fruits et légumes par exemple le texte en vigueur prévoit

« Pour garantir les apports en fibres et en vitamines, il convient de servir :
― au moins 10 repas avec, en entrée ou accompagnement du plat, des crudités de légumes ou des fruits frais ;
― au moins 8 repas avec en dessert des fruits crus ;
― 10 repas avec, en garniture ou accompagnement du plat protidique, des légumes cuits, autres que les légumes secs ; »

Aprifel contributeur des travaux du CNRC

Le CNRC regroupe les pouvoirs publics et sept collèges d’acteurs impliqués dans la restauration collective. Aprifel participe au groupe de travail nutrition du CNRC, co-piloté par la Direction Générale de la Santé et l’Association des Responsables de restauration collective publique – AGORES, administré par la Direction Générale de l’Alimentation. Ce groupe de travail a pour objectif de faciliter la mise en œuvre, en restauration collective, des actions prévues dans le Programme National pour l’Alimentation et la Nutrition (PNAN). Dans ce but, il a notamment vocation à développer des outils d’accompagnement pour faciliter la mise en œuvre de ces actions. Aprifel apporte son expertise technique à ce groupe de travail.

En savoir plus :

 

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