Consommation de F&L dans différents pays

Le rejet précoce des fruits et légumes, prémice d’une alimentation peu variée et déséquilibrée

Une alimentation variée inclut la consommation régulière de fruits et de légumes. Leur présence est associée à un moindre risque d’obésité et de maladies cardio-vasculaires. Certains enfants sont, de toute évidence, très tôt réfractaires à cette variété. Une étude récente prospective a permis de détecter les premiers signes de ce comportement et leur développement entre les âges de six mois, début de la diversification alimentaire, et 4 à 5 ans ¹.

Les données de trois grandes études prospectives européennes

Pour ce faire les auteurs ont associé les données de trois grandes études prospectives européennes : ALSPAC conduite en Grande-Bretagne, Génération XXI au Portugal, et Éden en France. Les comportements alimentaires ont été évalués au moment de la diversification entre quatre et six mois puis entre 12 et 15 mois, à 24 mois et entre 48 et 54 mois. L’analyse commune est basée sur les difficultés alimentaires de l’enfant, la perception par la mère de cette alimentation anormale, le refus de certains aliments et les difficultés à établir une routine alimentaire.

Ce travail confirme que les enfants qui présentent des difficultés alimentaires, un refus alimentaire précoce, une néophobie et des difficultés à accepter des habitudes alimentaires à l’âge d’un an consomment en général moins de fruits et légumes entre 4 et
5 ans.

Moins d’une portion de fruits par jour quel que soit l’âge

Les petits mangeurs, définis par le fait de manger en petite quantité aux repas ou de ne pas manger suffisamment, était fréquents : 25 % de 4 à 6 mois jusqu’à 66 % à 2 ans. Les enfants qui présentaient le plus de difficultés alimentaires consommaient en général moins d’une portion de fruits par jour quel que soit l’âge.

Le refus de certains aliments, ou des scores de néophobie plus élevés et des difficultés à accepter des habitudes alimentaires, en particulier à 2 ans puis entre 4 et 5 ans, étaient aussi associés à une consommation moindre de fruits et légumes entre 4 à 5 ans. Les résultats pour les fruits et les légumes étaient homogènes, les scores des légumes tendant à être inférieurs à ceux des fruits, donc leur consommation plus réduite.

Les détails sont intéressants : dans l’étude ALSPAC le lien entre les difficultés alimentaires et la consommation de moins d’un fruit par jour entre 4 et 5 ans était détectée dès l’âge de 4 à 6 mois et dans toutes les autres études dès l’âge d’un an.

84% des enfants portugais consomment des fruits et des légumes plus de trois fois par jour

Le refus d’un aliment ou la néophobie et la difficulté à accepter des habitudes alimentaires étaient repérés vers 2 ans. Le refus des légumes était aussi associé dès 4 à 6 mois à une consommation de légumes moins d’une fois par jour dans l’étude ALSPAC et à moins de trois fois par jour dans l’étude Génération XXI. En effet, au Portugal la consommation de soupe augmente la fréquence de consommation des légumes. Quatre-vingt-quatre pour cent des enfants portugais consommaient des fruits et légumes plus de trois fois par jour versus 62 % dans la cohorte ALSPAC et 20 % dans la cohorte Eden.

Quelles que soient les habitudes alimentaires d’un pays, une proportion notable d’enfants aura des difficultés à les accepter et donc une alimentation plus monotone entre 4 et 5 ans.

Les légumes les plus sucrés sont mieux acceptés chez les enfants difficiles

Les auteurs rappellent que la néophobie alimentaire et le rejet des légumes pourraient traduire une sensibilité particulière à l’amertume. L’exploration plus détaillée des catégories de légumes a révélé que les légumes les plus sucrés sont mieux acceptés chez ces enfants difficiles. On ne peut pas non plus éliminer une cause éducative au rejet de certains aliments. Ce travail ne permettait pas d’approfondir cette hypothèse.

Quoi qu’il en soit, aider les parents de jeunes enfants à apprécier les fruits et les légumes, qui restent des composantes clés d’une alimentation variée et protectrice, reste une nécessité.

Marie-Laure Frelut
Pédiatre, nutritionniste, ECOG (Groupe Européen de l’Obésité Infantile) - Service d’endocrinologie pédiatrique, Hôpital Bicêtre-Université Paris Sud - FRANCE
A. Oliveira, L. Jones, B. de Lauzon-Guillain, P. Emmett, P. Moreira, M. A. Charles, C. Lopes. Early problematic eating behaviours are associated with lower fruit and vegetable intake and less dietary variety at 4–5 years of age. A prospective analysis of three European birth cohorts. British J Nutr 2015;114: 763-761.
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