Les préférences alimentaires : rôle de la génétique et de l’environnement

Insuffisance cardiaque : les fruits et légumes confirment leurs effets bénéfiques

Même si le fardeau des maladies cardio vasculaires (MCV) a régulièrement diminué depuis une dizaine d’années, elles demeurent la première cause de mortalité dans les pays développés, représentant environ 1/3 de la mortalité dans le monde. Par ailleurs, leur incidence a augmenté depuis 25 ans dans les pays en voie de développement, en grande partie à cause de l’occidentalisation de l’alimentation. Modifier les risques alimentaires est aujourd’hui un acte de prévention et de traitement essentiel de ces pathologies.

Une revue récente de la littérature sur le sujet a tenté de définir les meilleures approches nutritionnelles pour préserver une bonne santé cardiaque. Les auteurs se focalisent sur la maladie coronaire et l’insuffisance cardiaque, qui demeurent les deux principales causes de mortalité CV dans le monde.

De nombreuses études d’intervention randomisées ont fait la preuve de l’impact bénéfique du Régime Méditerranéen (RM) et du régime DASH (Dietary Approach to Stop Hypertension).

Nous nous centrerons sur l’insuffisance cardiaque (IC) dont l’approche nutritionnelle a longtemps reposé sur la réduction du sel dans l’alimentation. De nouveaux arguments tendent à montrer que, même si une restriction sodée modérée reste indispensable (6 à 8 g de sel par jour), des approches nutritionnelles plus complexes comme le RM et le régime DASH jouent un rôle important dans sa prévention, son traitement et son pronostic.

L’insuffisance cardiaque: une maladie grave

L’IC est une maladie chronique, grave, invalidante et évolutive. Pour simplifier, le coeur devient incapable de maintenir un débit cardiaque suffisant pour assurer les besoins de l’organisme et le retour veineux. Cela entraîne une altération de la perfusion rénale responsable d’une mauvaise élimination du sodium, d’une rétention hydro sodée avec oedèmes, d’une surcharge de travail cardiaque qui au final aggravent l’IC. Son pronostic est sévère: première cause d’hospitalisation après 65 ans avec un taux élevé de ré-hospitalisations dans l’année suivant le diagnostic. Sa mortalité est supérieure à celle du cancer du sein et de la prostate. Elle aggrave également la qualité de vie des patients.

Régime méditerranéen et IC

Régime Méditerranéen : les points clés

  1. Forte consommation d’huile d’olive exclusive
  2. Forte consommation de légumes
  3. Forte consommation de fruits frais et secs
  4. Forte consommation de légumineuses (lentilles, haricots)
  5. Forte consommation de céréales (complètes) : pâtes, polenta, semoule, boulgour, riz et pain
  6. Consommation modérée à élevée de poisson
  7. Consommation faible de viande (ovine, caprine)
  8. Consommation modérée de laitages (fromage, yaourt)
  9. Consommation modérée d’alcool (vin)

On trouve dans une littérature abondante, de nombreux arguments montrant les effets bénéfiques du régime méditerranéen sur l’IC. De plus, cette approche permet de réduire les multiples facteurs de risque qui favorisent sa survenue (HTA, diabète). Diverses études prospectives de cohortes montrent une association entre une forte adhésion au RM et une plus faible incidence d’IC tant chez l’homme (réduction de 31% du risque relatif) que chez la femme (-21%). Le RM influence également la progression et la mortalité de l’IC: amélioration de la fonction ventriculaire, réduction des marqueurs d’IC (NT-pro BNP), réduction de l’incidence des morts subites (une des principales causes de mortalité chez l’IC). Ainsi dans une cohorte de plus de 37 000 hommes suédois, on a observé une réduction du risque relatif de mortalité de 45% chez ceux qui suivaient un RM. Tous ces résultats sont évidemment encourageants mais il s’agit de données d’études de cohortes qui ont besoin d’être confirmées plus solidement par des études d’interventions randomisées.

Régime DASH et IC

Ce régime est riche en F&L, laitages fermentés maigres, céréales complètes, volaille, poisson, noix, noisettes, amandes. Il est pauvre en sucreries, boissons sucées et viande rouge. Enfin il est riche en protéines et en fibres, en potassium, magnésium et calcium.

En 1997, au cours de l’étude DASH, il a démontré son efficacité pour réduire la pression artérielle en quelques semaines chez des sujets hypertendus.

Or de nombreuses études prospectives de cohortes, montrent que le régime DASH exerce également des effets positifs chez les patients IC. On retrouve ainsi une moindre incidence d’IC chez des femmes suédoises (réduction de 37% du risque relatif), une réduction des morts et des hospitalisations de 22% chez des hommes suédois. Une méta analyse de 2013 a montré une réduction de l’incidence de l’IC de 29%. Les mécanismes invoqués sont nombreux : réduction de la TA, amélioration de la fonction contractile du ventricule gauche… En outre il a montré également une amélioration de la qualité de vie.

De la même manière, ces résultats encourageants du régime DASH riche en F&L issus d’études de cohortes doivent être confirmés par des essais randomisés pour mieux préciser les recommandations nutritionnelles en cas d’IC.

L’approche diététique a désormais prouvé son efficacité pour la prévention et le traitement des MCV. Au final, ce sont les approches complexes (régime Méditerranéen, régime DASH) reposant sur les effets synergiques de multiples aliments qui ont démontré un bénéfice maximal. Dans les années à venir des essais randomisés viendront certainement améliorer nos connaissances sur les effets combinés des différents aliments pour la santé cardio vasculaire et fourniront une approche complémentaire aux traitements médicamenteux.

Thierry Gibault
Nutritionniste, endocrinologue, Paris - FRANCE
Ravera A et al, Nutrition and cardiovascular disease: finding the perfect recipe for cardiovascular health. Nutrients 2016, 8, 363; pp 1-27.
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