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Mythes en matière de nutrition : quand apprendre devient un jeu

L’étude du fardeau mondial des maladies, traumatismes et facteurs de risque (Global Burden of Diseases, Injuries, and Risk Factors Study – GBD) évalue la relation directe entre la mortalité et l’invalidité et les risques nutritionnels spécifiques.

De nombreux mythes sur l’alimentation « saine »

Portant sur 195 pays, cette étude a révélé qu’en 2017, à l’échelle mondiale, la consommation de presque tous les aliments et nutriments sains était suboptimale, tandis que celle de ceux néfastes pour la santé dépassait le niveau recommandé. D’un autre côté, le fardeau de morbidité attribuable à des facteurs nutritionnels était considérable : 11 millions de décès et 255 millions d’années de vie corrigées du facteur d’invalidité ¹. Une alimentation de mauvaise qualité nutritionnelle présente plus de risques, en termes de morbidité et de mortalité, que les rapports sexuels non protégés, l’alcool, la drogue et le tabac combinés ². Toutefois les publicités agro-alimentaires, les faux régimes «miracles» et le manque de formation des professionnels de santé, ont créé de nombreux mythes sur
l’alimentation «saine». Ces fausses croyances se sont perpétuées.

Résultats : les consommateurs éprouvent des difficultés à manger correctement, et les professionnels de santé peinent à donner des conseils nutritionnels de qualité.

La « ludification » : rendre l’apprentissage en nutrition agréable et efficace

Pour encourager la réflexion critique et permettre de se représenter l’importance des preuves scientifiques étayant les conseils nutritionnels fournis en consultation, nous avons conçu une activité pédagogique basée sur des techniques de ludification. Le terme « ludification » désigne l’application de mécanismes et d’éléments de jeu dans des contextes non ludiques, dans le but de rendre l’apprentissage plus agréable et efficace. Il a été prouvé que cette méthode renforce les connaissances, compétences et aptitudes d’apprentissage, notamment en matière de résolution des problèmes, de travail en équipe ou de communication 3,4.

Un atelier dédié aux « mythes en nutrition »

Selon cette approche, nous avons présenté un atelier dédié aux «mythes en nutrition» lors du 5e Forum du Vasco da Gama Movement, qui a rassemblé 47 personnes de 11 pays, en janvier 2018. Pour la plupart, les participants ont déclaré n’avoir reçu aucune formation en nutrition à l’Université ou, au mieux, limitée à une ou deux semaines.

Ils ont été répartis en groupes de 7 à 8 personnes. Chaque groupe a reçu un jeton de couleur à déplacer sur le panneau regroupant quatre sujets liés à la nutrition : l’obésité, les régimes alimentaires, les pathologies ou un ensemble des thèmes.

L’équipe pédagogique a abordé de nombreux mythes sur la nutrition par des questions comme :

  • Est-il plus sain de manger 5 repas par jour ?
  • Les produits allégés sont-ils efficaces pour prévenir l’obésité ?
  • Devrions-nous éviter les graisses ?
  • Un verre de vin par jour prévient il les risques de crise cardiaque ?
  • Les végétariens ont-ils tendance à plus souffrir d’anémie ou d’ostéoporose ?
  • Les jus « détox » sont-ils efficaces ?
  • Les aliments « bio » sont-ils plus sains ?

Croyances générales en matière de nutrition

Après chaque question, l’équipe pédagogique clarifiait le sujet avec une explication rapide sur les preuves scientifiques disponibles, ce qui donnait lieu à un court débat pour encourager une réflexion critique chez les participants.

Les nombreuses croyances auxquelles les groupes ont répondu étaient :

  • le petit déjeuner est le repas le plus important pour prévenir l’obésité
  • les sucres non raffinés sont plus sains que les sucres blancs
  • les végétariens doivent prendre des suppléments en fer
  • le lait écrémé est meilleur pour la santé que le lait entier, etc.

La nutrition demeure largement insuffisante dans les formations actuelles

Les participants ont déclaré que cet atelier a éveillé leur conscience scientifique. Deux participants souhaitent même reproduire l’atelier dans leur pays.
La ludification est de plus en plus utilisée pour compléter les stratégies de formation traditionnelles, car elle offre un ensemble d’avantages sociaux, émotionnels et cognitifs qui la rendent très attractive en termes d’apprentissage 5,6,7.
Il est essentiel de prendre conscience du besoin des professionnels de santé de se former correctement en nutrition. Alors qu’elle a un impact considérable sur notre santé, la nutrition demeure largement insuffisante dans les formations actuelles.

AM. Artime
Médecine familiale et communautaire, clinique de Villaconejos, Madrid, ESPAGNE
collaborateurs
  1. GBD 2017 Risk Factor Collaborators. Lancet 2018; 392: 1923–94
  2. Willett W, et al. Lancet 2019; 393: 447–92
  3. Zichermann & Cunningham (2011). Sebastopol, CA: O’Reilly Media.
  4. Werbach, K., & Hunter, D. (2012). Wharton Digital Press.
  5. Lamyae Sardi, Ali Idri, J.L. Fernández -Alemán. Journal of Biomedical Informatics 2017; 71: 31-34
  6. C. Carreras. Quaderns de filosofía 2017; Vol. IV Num. I: 107-118
  7. Earla J White, Joy H Lewis, Lise McCoy. Advances in Medical Education and Practice 2018; 9: 407-414
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