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Flavonoïdes et santé osseuse : Quels arguments ?

Au Royaume Uni, on estime qu’après l’âge de 50 ans, une femme sur deux et un homme sur cinq auront des fractures ostéoporotiques 1. La prévalence de l’ostéoporose et des fractures associées est en augmentation 2. Une alimentation de mauvaise qualité pourrait jouer un rôle dans la pathogénèse de l’ostéoporose.

Les recherches nutritionnelles sur la santé osseuse se sont longtemps focalisées sur quelques éléments nutritionnels, comme le calcium et la vitamine D. Depuis peu, de nouvelles recherches s’intéressent au rôle des protéines et des nutriments présents dans les fruits et légumes, en particulier une famille de substances retrouvées fréquemment dans les fruits et légumes : les flavonoïdes.

Flavonoïdes : des sources alimentaires très variables

Tous les végétaux contiennent des flavonoïdes. Si on en a identifié plus de 5000, la majorité n’est pas consommée dans l’alimentation occidentale, ce qui explique qu’ils aient longtemps peu attiré l’attention en termes de bénéfices pour la santé. Les flavonoïdes alimentaires les plus consommés sont les flavonols, les flavones, les catéchines, les procyanidines et les flavanones.

Les fruits contiennent des flavonols (pommes et fruits à noyaux), des flavanones (agrumes) et des catéchines (baies rouges). Les flavonols abondent dans la plupart des végétaux (surtout les oignons et les crucifères). Les flavones se trouvent dans le céleri, la laitue et les poivrons. Les catéchines et procyanidines ont été décelés dans des légumineuses, comme les haricots verts et les fèves. Si les catéchines sont les flavonoïdes alimentaires les plus abondants dans les boissons (le thé en contient de fortes concentrations), on trouve également des flavonols dans les jus de fruits et le thé. La consommation de flavonoïdes dans le monde est très variable car les différentes populations tirent leur alimentation de sources très différentes. En Finlande, les pommes en sont une source majeure tandis qu’en Italie c’est plutôt le vin rouge. Les sources principales de flavonoïdes varient également dans chaque pays en fonction des changements de type d’alimentation. Actuellement au Japon, l’oignon représente la source principale de flavonols et flavones. Autrefois, le thé vert était la source principale de la majorité des flavonoïdes alimentaires.

Une étude chez 3000 femmes écossaises

Des modèles animaux ont montré un lien positif entre la consommation de flavonoïdes et une meilleure santé osseuse 3.

Chez l’homme, les études se sont surtout cantonnées au thé, dont l’effet protecteur contre les fractures de la hanche 4 a été reconnu. Cependant, la relation entre le thé et la densité minérale osseuse (DMO) n’est pas claire et les résultats des différentes études sont contradictoires.

La première étude épidémiologique qui a examiné l’influence des flavonoïdes alimentaires sur la DMO et le remodelage osseux a été menée auprès de plus 3000 Ecossaises ménopausées inscrites dans une même étude longitudinale 5. Elles ont bénéficié d’une mesure de la densité osseuse au niveau de la colonne vertébrale et des hanches. Les marqueurs de résorption osseuse (comme la déoxypyridinoline DPD et la pyridinoline PYD) ont été mesurées dans leurs urines. Leur alimentation a été analysée à l’aide d’un questionnaire validé de fréquence alimentaire et leurs consommations de flavonols, flavones, catéchines, procyanidines et flavanones ont pu être évaluées.

La consommation totale moyenne de flavonoïdes alimentaires était de 307 mg/jour. Le thé était la principale source de flavonoïdes alimentaires (57%). Venaient ensuite les fruits frais et les jus de fruits (18% et 12% respectivement).

Flavonoïdes des fruits et légumes : un rôle plus spécifique ?

Une association significative a été notée entre la consommation totale de flavonoïdes et les DMO des hanches et de la colonne vertébrale. On retrouvait également une corrélation négative entre les apports en flavonones alimentaires et les marqueurs de résorption osseuse. Les variations annuelles de catéchines et de procyanidines étaient associées aux modifications des DMO des hanches et de la colonne vertébrale.

Une sous-étude, analysant exclusivement des flavonoïdes provenant des fruits et légumes, a montré que ceux-ci étaient plus fortement liés aux DMO de la colonne vertébrale que les flavonoïdes provenant d’autres sources. Les marqueurs de résorption osseuse ont été associés négativement à la consommation totale de flavonoïdes, de flavonols et de flavanones provenant des fruits et légumes.

Il a ainsi été montré que les flavonoïdes provenant exclusivement des fruits et légumes étaient associés à une réduction de la résorption osseuse.

Un puzzle encore incomplet…

Cette étude portant sur plus de 3000 femmes a montré une association bénéfique entre une consommation accrue de flavonoïdes et une meilleure santé osseuse. Cette association n’était cependant pas très solide et les flavonoïdes alimentaires pourraient n’être que des marqueurs d’une alimentation saine.

Quoiqu’il en soit, si les fruits et légumes sont bien bénéfiques pour la santé osseuse, les flavonoïdes ne constituent qu’une pièce du puzzle. Et ce puzzle reste incomplet.

Antonia Hardcastle
Division de Médecine Appliquée, Université d’Aberdeen, Royaume Uni
  1. Van Staa et al. (2001) Bone 29, 517-22.
  2. Sambrook and Cooper (2006) Lancet 367, 2010-8.
  3. Chiba et al. (2003) J Nutr 133, 1892-7.
  4. Johnell et al. (1995) J Bone Miner Res 10, 1802-15.
  5. Hardcastle et al. (2011) J Bone Miner Res 26 941-7
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