« Consommation de fruits & légumes chez les personnes âgées »

Quand les fruits et légumes améliorent les défenses immunitaires des personnes âgées 1

Le vieillissement est associé à un déclin de l’immunité 2 et, par conséquent, à un risque accru d’infection 3 qui peuvent affecter le statut nutritionnel 4. Or, les personnes âgées ont de faibles consommations de fruits et légumes (F&L) 5,6. Augmenter la consommation de F&L dans cette population pourrait améliorer leur santé. Il a été montré, en effet, que plusieurs micronutriments associés à une alimentation riche en F&L, comme les caroténoïdes, les flavonoïdes et la vitamine C, ont des effets bénéfiques sur le système immunitaire 7. Nous avons donc mené un essai randomisé contrôlé pour étudier si l’augmentation de la consommation de F&L pourrait améliorer les fonctions immunitaires chez les seniors.

Essai d’Intervention sur le Vieillissement et l’Alimentation dans la « vraie vie »

Nous avons réparti de manière aléatoire, en deux groupes, 83 volontaires sains, âgés de 65 à 85 ans, consommant peu de fruits et légumes (≤ 2 portions/jour). Dans un groupe, ils ont augmenté leur consommation de F&L à 5 portions/jour, dans l’autre ils l’ont maintenu à ≤ 2 portions/jour pendant 16 semaines.

En accord avec les recommandations de l’Agence des Standards Nutritionnels (Food Standards Agency), une portion correspond à 80g, soit une pomme, une orange ou une banane, 3 cuillères à soupe de légumes ou 150 ml de jus de fruits.

Ensuite, à 12 semaines, les participants ont été vaccinés (Tétanos et Pneumovax II) par voie intramusculaire (0,5 ml). Les titres d’anticorps ont été mesurés en tant que marqueur clinique de la réponse immunitaire (IgG totaux contre le tétanos; IgG totaux et IgG2 contre les polysaccharides capsulaires des pneumocoques).

Nous avons conçu cette étude pour refléter « la vraie vie » dans laquelle les sujets consomment simplement leurs F&L préférés. Durant l’étude, les participants n’ont à aucun moment bénéficié de recommandations pour les F&L. La consommation d’une « grande variété » de F&L était encouragée. L’objectif de 5 portions/jour a été présenté comme réalisable et conforme aux recommandations de santé publique de « 5 par jour ».

Aider les participants à intégrer les F&L dans leur alimentation quotidienne

L’observance a été surveillée de près durant toute l’intervention à l’aide d’un journal alimentaire et par l’analyse de taux de biomarqueurs des nutriments. Des sessions individuelles d’éducation nutritionnelle ont aidé les participants à intégrer les F&L dans leur alimentation quotidienne. Les participants ont reçu chaque semaine une livraison gratuite de F&L à domicile.

Au début de l’étude, tous les participants consommaient en moyenne 1,4 portions de F&L/jour. Dans le groupe des 5 portions/jour, cette consommation a changé de manière significative, comparé au groupe des 2 portions/jour. Ainsi, respectivement, on a noté une augmentation moyenne de 4,6 portions par jour comparé à 0,4 portions. D’importants changements plasmatiques pour les micronutriments (vitamine C, zéaxanthine, β-cryptoxanthine et lycopène) ont également été notés dans le groupe 5 portions/jour.

Une augmentation de la consommation de F&L améliore la réponse au vaccin Pneumovax

Les participants du groupe « 5 portions/jour » ont eu une plus forte réponse des anticorps au vaccin Pneumovax II que ceux ayant une alimentation faible en F&L. Les anticorps liés aux polysaccharides de la capsule des pneumocoques (IgG totaux) ont augmenté de manière significative dans le groupe « 5 portions/jour » par rapport au groupe 2 portions/jour (avec une Intervalle de Confiance à 95% pour le ratio semaine 16/départ respectivement de 3,1 (2,1 – 4,4) et 1,7 (1,3 – 2.1) p=0,001). Cette augmentation était particulièrement marquée chez les participants qui n’avaient jamais reçu de vaccin Pneumovax II. Une portion quotidienne supplémentaire de F&L entraînerait une augmentation de la réponse des IgG totaux et des IgG2 de 18% et 17%, respectivement.

En revanche, concernant la réponse immunitaire au vaccin contre le tétanos, nous n’avons pas observé de différences entre les deux groupes.

Un impact probable sur l’impact des campagnes de vaccinations

Le lien entre la consommation de F&L et la hausse de la réponse du système immunitaire n’est pas totalement clair. Nos résultats suggèrent qu’une augmentation de la consommation de F&L augmenterait la fonction anticorps des cellules T, par un mécanisme inconnu, ce qui entraînerait une plus forte réponse immunitaire. Le système immunitaire des personnes âgées est moins performant que celui des sujets jeunes, ce qui se caractérise par des taux plus forts de maladies chroniques et une vulnérabilité accrue aux infections. Nos résultats pourraient avoir un impact sur la santé publique, en particulier sur l’impact des campagnes de vaccination.

Une bonne raison d’encourager ‘5 fruits et légumes par jour’

Etant donné l’accroissement de la population âgée, il est important d’envisager des recherches supplémentaires sur le maintien du bon fonctionnement du système immunitaire grâce à l’alimentation. Pour la première fois, nous avons montré que la consommation de 5 portions de F&L par jour augmente la réponse des anticorps au vaccin Pneumovax II chez les personnes âgées. Nos résultats représentent une bonne raison d’encourager les personnes âgées à consommer 5 portions de fruits et légumes par jour.

Charlotte E. Neville
Centre de Santé Publique, Ecole de Médecine, de Médecine Dentaire et de Sciences Biomédicales, Queen’s University, Belfast, ROYAUME UNI
Jayne V. Woodside
Centre de Santé Publique, Ecole de Médecine, de Médecine Dentaire et de Sciences Biomédicales, Queen’s University, Belfast, ROYAUME UNI
  1. Gibson A, et al. Effect of fruit and vegetable consumption on immune function in older people: a randomised controlled trial. Am J Clin Nutr 2012;96:1429-36.
  2. Dorshkind K, et al. The ageing immune system: is it ever too old to become young again? Nature Rev Immunol 2009;9:57-62.
  3. Garibella S. Vitamin and mineral supplements for preventing infections in older people. BMJ 2005;331:304-5.
  4. Meydani M. Nutrition interventions in aging and age-associated disease. Proc Nutr Soc 2002;61:165-71.
  5. Appleton KM, et al. Fruit and vegetable consumption in older people in Northern Ireland: levels and patterns. Br J Nutr 2009;102:949-53.
  6. Wakimoto P & Block G. Dietary intake, dietary patterns, and changes with age: an epidemiological perspective. J Gerontol A Biol Sci Med Sci 2001;56:S65-S80.
  7. Webb AL & Villamor E. Update:effects of antioxidant and non-antioxidant vitamin supplementation on immune function. Nutr Rev 2007;65:181-217.
Retour Voir l'article suivant