LES DÉFIS DE L’OBÉSITÉ INFANTILE : Plaidoyer pour une alimentation équilibrée ou peine perdue ?

Édito

“Il ne faut pas aller contre son temps”, “On ne peut pas empêcher les enfants de manger des friandises”, font partie des formules les plus urbaines pour dissuader tout adulte, pédiatre ou non, de jouer les empêcheurs de grossir en rond. Lorsque le vent fraîchit, l’allusion à une inadaptation complète à la société affleure… La question de fond reste donc posée : faut-il craindre d’aller à contre courant ? Non bien sûr ! Faut-il accepter de voir caricaturer des recommandations raisonnables ? Pas davantage.

Mais alors, que dire ? Au risque de décevoir : rien de bien nouveau.

Que sait-on exactement des facteurs de risque alimentaire chez l’enfant et l’adolescent ? Leur rôle est indiscutable mais il n’exclut, ni une participation du terrain génétique, ni une part de sédentarité excessive.

Comment les cerner ? En considérant la “chaîne alimentaire” dans son ensemble…

Ainsi devient-il évident que les difficultés sont d’ordres divers :

  • La qualité de certains aliments : posent problèmes ceux qui sont très gras, très sucrés, trop salés et les boissons sucrées dont les calories sont le plus souvent
    superflues.
  • L’équilibre alimentaire : connu en théorie, il correspond à un nombre illimité de combinaisons d’aliments. Les informations à son sujet sont nombreuses mais ne peuvent que rester très générales, donc floues. D’où des messages clés, aisés à comprendre et diffuser. Dix fruits et légumes par jour est l’exemple type. Son respect dans les familles, mais aussi les collectivités, place celles-ci au pied du mur. L’école ne peut prétendre enseigner en théorie ce qu’elle se garde d’appliquer. Les familles ont un rôle essentiel, qui nécessite du temps et de la patience.
  • La pression générale exercée sur les consommateurs : la loi du plus fort n’est plus censée faire partie du mode de gouvernement qu’ont choisi les Européens. Force est de constater que s’opposer aux intérêts financiers de quelques uns est outrecuidant. Le prix de vente des fruits et des légumes frais renvoie le simple citoyen, par exemple, à bien des questions sur la pertinence des options de la politique agricole européenne. La levée de boucliers qu’entraîne toute velléité de protection des enfants et des adolescents en est un autre exemple.
  • L’évolution du style de vie : manger seul, manger vite n’est pas exceptionnel même pour un jeune enfant. Face à cela, il n’est pas question de “régime”.

Bien vivre, donc – entre autres, bien manger, n’exclut ni le plaisir ni la diversité. Le rôle du monde de la santé est de rassurer, d’aider à maintenir du bon sens, de reconnaître que choisir implique de savoir dire aussi bien oui que non.

La santé des enfants est à ce prix et à celui-là seulement.

Marie-Laure Frelut
Pédiatre, nutritionniste, ECOG (Groupe Européen de l’Obésité Infantile) - Service d’endocrinologie pédiatrique, Hôpital Bicêtre-Université Paris Sud - FRANCE
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