Politiques publiques : un levier pour promouvoir une alimentation saine

Brésil : le programme pour une école durable permettrait de réduire significativement les émissions de gaz à effet de serre

Alors que plus d’un quart des émissions de gaz à effet de serre sont issues des systèmes alimentaires, il est nécessaire de les faire évoluer vers plus de durabilité. Pour répondre à ces enjeux, le programme brésilien pour une école durable – visant à intégrer la durabilité dans l’élaboration des repas scolaires – a été proposé en 2018 auprès de 32 000 élèves et étudiants. Une étude récente a évalué les potentiels avantages environnementaux, ainsi l’impact nutritionnel associés. D’après ce travail, les menus retravaillés présentent un profil nutritionnel globalement similaire aux menus habituels mais permettent une réduction significative des émissions de gaz à effet de serre.

Face au changement climatique, les efforts actuels visent à diminuer l’impact de l’activité humaine. A cette fin, des données récentes suggèrent que la modification des régimes alimentaires est une mesure clé pour réduire les émissions de gaz à effet de serre (Springmann, 2018). Dans ce but, les écoles constituent un lieu intéressant puisqu’elles permettent d’atteindre une population importante et d’induire des changements de comportement sur le long terme (Sidaner, 2013).

Au Brésil, le programme national d’alimentation scolaire constitue l’une des politiques publiques les plus anciennes. Crée en 2014 pour lutter contre la faim et la malnutrition, les objectifs de ce programme nécessitent toutefois d’être réexaminés afin de répondre aux défis actuels liés au changement climatique. Face à ces enjeux, un nouveau programme pour une école durable a été élaboré.

Visant à améliorer la qualité des repas scolaires en y intégrant la durabilité, ce programme a été mis en place dans 155 écoles de 4 municipalités de la province de Bahia, touchant ainsi plus de 32 000 élèves. Pour cela, le programme proposait une refonte des menus habituels et une adoption progressive de menus durables constitués, de préférence, d’ingrédients d’origine végétale (voir méthodologie). Une étude récente (Kluczkovski, 2022) a évalué l’impact environnemental et la pertinence nutritionnelle de ce dispositif.

Des menus nutritionnellement équivalents mais encore trop transformés

D’après ce travail, le profil nutritionnel des menus habituels et des menus durables est sensiblement équivalent. En crèche et en école maternelle, les seules différences statistiquement significatives concernent les apports en fer, le menu durable présentant des teneurs plus élevées. Dans les écoles élémentaires, les établissements secondaires et autres établissements de formation supérieure, le menu durable présente des teneurs significativement plus importantes en magnésium. Tous âges confondus, les apports en calcium et en cholestérol étaient significativement plus élevés dans le menu habituel.

En ce qui concerne le degré de transformation des repas, le menu durable proposé en crèche et en maternelle présente un apport calorique plus élevé en aliments transformés et ultra-transformés et plus faible en aliments non transformés que le menu habituel. Ce résultat était escompté car certains aliments du menu habituel comme la viande, les produits laitiers et les œufs ont été substitués par du soja et des cacahuètes, riches en protéines mais plus faibles en calories. Cette substitution réduit automatiquement le pourcentage de calories provenant d’aliments non transformés et augmente la participation calorique des autres groupes alimentaires.

Dans les écoles élémentaires et les autres établissements de formation supérieure, on observe l’inverse où le menu durable présente un apport calorique plus élevé en aliments non-transformés et plus faible en produits transformés et ultra-transformés.

Toutefois, il convient de souligner que les deux menus étudiés sont constitués à plus de 58% d’aliments ultra-transformés.
Kluczkovski, 2022

L’adoption d’un menu durable permettrait de réduire jusqu’à 17% les émissions de gaz à effet de serre

Pour les deux tranches d’âge étudiées, les émissions globales de gaz à effet de serre des menus durables étaient inférieures à celles des menus habituels. De plus, la quantité totale d’émissions de gaz à effet de serre semble diminuer avec la mise en place de menus durables. En effet, l’adoption d’un menu durable 4 jours par semaine permettrait de réduire les émissions de gaz à effet de serre :

  • De 400kg CO2/an à 240kg CO2/an pour les menus proposés en crèche et en écoles maternelles ;
  • De 242kg CO2/an à 132 kg CO2/an pour les menus proposés en écoles élémentaires et dans les établissements secondaires.

Enfin, ce travail démontre que passer du menu habituel 4 jours par semaine à deux jours par semaine a permis de réduire de 15% les émissions de gaz à effet de serre pour les crèches et écoles maternelles et de 17% pour les autres groupes scolaires. En augmentant la part de menus durables dans les cantines, cette réduction pourrait atteindre 40 à 45% selon les groupes scolaires.

Une initiative qui pourrait inspirer les politiques publiques dans d’autres régions du monde

En tant que première tentative de calcul de l’impact des menus scolaires sur le climat, cette étude démontre que l’adoption de menus durables représente une stratégie efficace pour réduire les émissions de gaz à effet de serre tout en améliorant la qualité des apport nutritionnels.

Les résultats de ce travail fournissent une base solide pour la mise en œuvre et le choix de stratégies durables efficaces. Cette étude fournit également aux restaurateurs et aux décideurs politiques des informations sur la manière d’adapter et de modifier les menus, ainsi que sur les programmes éducatifs à mettre en place pour réduire l’impact de l’alimentation sur le climat.

Cette étude constitue un projet pilote qui pourrait être transposé dans d’autres régions du Brésil ainsi que dans d’autres pays du monde.

Basé sur : Kluczkovski A, et al. An Environmental and Nutritional Evaluation of School Food Menus in Bahia, Brazil That Contribute to Local Public Policy to Promote Sustainability. Nutrients. 2022 Apr 6;14(7):1519.

Méthodologie
Messages clés
  • Les menus habituels et durables sont équivalents en termes d’apports en nutriments, à l’exception du calcium, du fer, du magnésium et du cholestérol.
  • Les menus durables ont permis de réduire les émissions de gaz à effet de serre jusqu’à 17 % en fonction du groupe scolaire étudié.
  • Le programme pour une école durable démontre qu’il est possible de réduire de manière substantielle l’impact des menus scolaires sur le climat et peut servir d’inspiration pour d’autres régions du Brésil et d’autres pays.
Références
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