Désir de grossesse et alimentation : la place des fruits et légumes

L’insécurité alimentaire en France : une nouvelle pauvreté ?

L’insécurité alimentaire est la traduction d’un accès insuffisant, en quantité ou en qualité, à une nourriture saine et socialement acceptable.

Un critère utilisé dans 3 grandes enquêtes nationales

L’insécurité alimentaire se mesure, à l’aide d’un indicateur subjectif reposant sur la question suivante :

« Parmi ces quatre situations, laquelle correspond le mieux à celle actuelle de votre foyer :

  1. Vous pouvez manger tous les aliments que vous souhaitez
  2. Vous avez assez à manger mais pas tous les aliments que vous souhaiteriez.
  3. Il vous arrive parfois de ne pas avoir assez à manger.
  4. Il vous arrive souvent de ne pas avoir assez à manger.

Les personnes répondant par l’affirmative à l’une des trois dernières propositions sont considérées comme en situation d’insécurité alimentaire. En France, cet indicateur a été utilisé dans les 3 grandes enquêtes nationales récentes sur l’alimentation :

  • l’enquête Individuelle sur les Consommations Alimentaires : INCA2 2006-2007 1
  • l’Etude Nationale Nutrition Santé : ENNS 2006 2
  • le Baromètre Santé Nutrition : BSN 2008 3

Encore moins de fruits et légumes que les plus pauvres

Selon l’enquête INCA 2, 12 % des adultes vivent dans une situation d’insécurité alimentaire. Ce sont plutôt des personnes jeunes, en majorité des femmes, vivant le plus souvent seules ou en situation de monoparentalité.

Dans cette enquête, on a comparé les personnes en insécurité alimentaire à celles en situation de sécurité alimentaire, et plus particulièrement aux plus pauvres d’entre elles.

On s’en doute : par rapport au reste de l’échantillon, les personnes en insécurité alimentaire et les personnes les plus pauvres consomment moins de fruits, de légumes, de poisson, et plus d’aliments sources de calories bon marché. Cependant, les personnes en insécurité alimentaire consomment encore moins de fruits et légumes que les plus pauvres (respectivement 275 vs 320 g/j de fruits et légumes). En outre, parmi les aliments bon marché, les personnes en insécurité alimentaire sélectionnent plus volontiers des produits sucrés alors que les plus pauvres se tournent plutôt vers des féculents raffinés. Au final, les personnes en situation d’insécurité alimentaire ont l’alimentation la plus mauvaise en termes de qualités nutritionnelles, à la fois très dense en énergie et pauvre en micronutriments. Bien qu’elles aient un revenu en moyenne supérieur à celui des plus pauvres, les personnes en insécurité alimentaire sont le plus souvent seules et doivent faire face à des dépenses non alimentaires élevées, notamment pour le logement et le tabac. Elles présentent également des difficultés importantes en termes d’accès aux soins.

2,5% des Français sont en insécurité alimentaire sévère

L’enquête Baromètre Santé Nutrition (BSN 2008) s’est, quant à elle, plus particulièrement attachée à décrire les caractéristiques des personnes en situation d’insécurité alimentaire sévère (c’est-à-dire ayant répondu oui aux items 3 et 4). Cette situation concerne 2,5 % de la population générale. L’alimentation de ces personnes en insécurité alimentaire sévère montre des similitudes avec celle des plus pauvres, pour ce qui est de la faible diversité alimentaire, mais s’en distingue par une consommation plus fréquente de sodas et de plats préparés. Ces personnes font des repas simplifiés, souvent consommés dans un contexte d’isolement, en regardant la télévision. Elles fréquentent plus souvent que les autres les établissements de restauration rapide. Ces données suggèrent que les personnes en situation d’insécurité alimentaire sévères sont soumises, non seulement à des contraintes budgétaires mais aussi à des difficultés pour transporter, stocker et transformer les aliments. Associées à la solitude et l’isolement, ces difficultés pratiques pourraient expliquer que leur alimentation soit si déstructurée.

Une réalité qui touche 12% de la population française

Ces enquêtes montrent bien que les personnes en insécurité alimentaire ont l’alimentation la plus mauvaise en terme de qualité nutritionnelle et consomment encore moins de fruits et légumes (F&L) que les personnes les plus pauvres. Elles tendent à montrer également que, contrairement à certaines idées reçues, les personnes aux plus faibles revenus ne sont pas forcément celles qui consomment le moins de F&L. L’insécurité alimentaire est une réalité en France et ne se résume pas à la pauvreté monétaire. Elle concerne 12% de la population, soit 3 à 4 fois plus que le recours à l’aide alimentaire. Pour combattre cette situation d’insécurité alimentaire et ses effets néfastes sur la santé, il importe que les actions de prévention et d’éducation nutritionnelle ciblant les plus démunis ne se limitent pas aux seules structures d’aide alimentaire.

Nicole Darmon
UMR MOISA Montpellier, FRANCE
Aurélie Bocquier
ORS PACA, Observatoire Régional de la Santé Provence Alpes Côte d'Azur, Marseille.
  1. Darmon N, Bocquier A, Vieux F, Caillavet F. L’insécurité alimentaire pour raisons financières en France, pp141-161. in Les travaux de l’Observatoire National de la Pauvreté et de l’Exclusion Sociale 2009-2010. La documentation Française. Sous presse.
  2. Méjean C, Salanave B, Agbo M, et al. Household food insecurity and its determinants in the French adult population. 4ième Congrès de la Société Française de Nutrition, 10-12 dec 2009, Montpellier
  3. Darmon N, Bocquier A, Lydié N. Nutrition, revenus et insécurité alimentaire, pp272-301. in Baromètre Santé Nutrition 2008 Escalon H , Bossard C , Beck F. Saint-Denis, Coll. Baromètres santé, 2009: 424 p.
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