Fruits & légumes : prévention des maladies neurodégénératives

Mange ta soupe et… … porte-toi bien !

Des chercheurs nord-américains du Penn State Laboratory(1) ont récemment montré que la consommation, en début de repas, d’une soupe de légumes réduisait sensiblement le nombre total de calories ingérées lors de ce même repas.

La soupe de légumes : une stratégie efficace pour contrôler son poids

Des volontaires se sont vus proposer une soupe à base de légumes (brocolis, pommes de terre, choux-fleurs et carottes) et de bouillon de poulet tandis que d’autres participants devaient se contenter du même repas sans soupe. Résultat : alors même qu’ils bénéficiaient d’un plat supplémentaire, les mangeurs de soupe (sans crème fraîche ajoutée !) ont consommé 20 % de calories de moins que les autres sujets. Plusieurs variantes de la recette ont été testées : bouillon et légumes séparés, légumes réduits en purée, découpés en gros morceaux, mélange de purée et de morceaux, etc. Elles ont abouti au même résultat. La soupe de légumes apparaît ainsi comme une stratégie efficace pour contrôler son poids corporel : elle permet de réduire ses apports caloriques sans ressentir la faim.

En étudiant de façon spécifique l’impact de la soupe “basses calories” (pas plus de 100 à 150 kcals par portion), ce travail confirme les résultats de nombreuses études d’observation ou d’intervention antérieures : les sujets privilégiant les aliments de faible densité énergétique mangent davantage (en quantité) que les personnes dont l’alimentation présente une densité énergétique élevée… mais leur apport calorique final est bien moins élevé.

Associé à la richesse des légumes en micronutriments protecteurs, cet effet satiètogène de la soupe devrait accélérer sa réhabilitation, amorcée depuis peu. Jusqu’à une époque récente, la consommation de soupe n’avait en effet cessé de diminuer : elle était perçue comme un plat populaire et “archaïque” et, de surcroît, long et fastidieux à préparer.

La soupe des origines : un aliment central

Nos ancêtres du paléolithique ne boudaient pas la soupe, bien au contraire. Elle leur permettait de se rassasier mais aussi de s’hydrater et de se réchauffer, ce qui pouvait s’avérer vital en période de grands froids. Mais pour que la soupe parvienne progressivement à occuper une place centrale dans l’alimentation des hommes, deux conditions durent être réunies : la maîtrise du feu et la disposition de récipients étanches pour contenir l’eau à chauffer. Les premières cuissons furent en effet réalisées à la chaleur sèche des flammes vives, des braises ou des pierres préalablement chauffées. L’immersion d’aliments dans de l’eau portée à ébullition – et donc la préparation de soupes – représenta un progrès notable. Pour y parvenir, la première idée a consisté à faire chauffer des pierres puis à les plonger dans l’eau contenue dans un récipient naturel : calebasse, peau ou panse d’animal, carapace de tortue… qui ne pouvaient supporter le contact avec les flammes. Une variante a consisté à creuser un trou dans le sol, à en tapisser les parois avec des pierres pour les rendre étanches, puis à remplir ce trou d’eau dans laquelle on jetait, en les remplaçant régulièrement, des pierres surchauffées (la technique est encore pratiquée par certains peuples de chasseurs collecteurs de Polynésie). Plus tard, l’invention des poteries, récipients durables et transportables, étanches et résistants au feu, permit de réaliser “potées” et autres “potages”. A l’époque médiévale, ce terme de potage s’appliquait de façon très large à tous les plats qui étaient cuits dans des pots. Et le terme de “soupe” désignait non pas le liquide fumant mais la tranche de pain sur laquelle était versé un bouillon de viande, de volaille, de légumes ou de légumes secs (pois, fèves)… d’où l’expression “tremper la soupe”.

La soupe de la Renaissance : “le bon gouvernement de la santé”

L’invention de la soupe avait ouvert la possibilité d’associer, dans une même préparation, des aliments nombreux et très divers : légumes, légumes secs, céréales, racines et tubercules, herbes, mais aussi viande, poisson, œufs, etc. En réalité, tous les produits que l’on a sous la main ont vocation à être jetés dans la marmite : ils donnent à la soupe une couleur et une saveur qui varient au gré des régions et des saisons. Mitonnée toute la journée dans la cheminée, la soupe accompagnée de pain a constitué l’élément de base de l’alimentation des humbles jusqu’à l’aube du XXe siècle.

La cuisine est véritablement née avec la soupe ! Et avec elle, le plaisir de créer d’infinies combinaisons et, ce faisant, de découvrir de nouvelles saveurs. Par ailleurs, la soupe offre la possibilité de bénéficier de la complémentarité et, plus encore, de la synergie des micronutriments que recèle, en quantité plus ou moins importante, chacun des légumes et autres aliments utilisés. Mais cette valeur santé que l’on attribue aujourd’hui à la soupe n’est pas une découverte. Déjà à la Renaissance, le médecin transalpin Savonarole la recommande vivement “pour le bon gouvernement de la santé”.

Eric Birlouez
Sociologue de l’agriculture et de l’alimentation, Paris, FRANCE
  1. Penn State Laboratory for the Study of Human Ingestive Behavior (http://live.psu.edu)
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