Fruits & légumes : prévention des maladies neurodégénératives

Parents : si vous aimez vos enfants, coupez la télé pendant les repas

La télévision, par de multiples mécanismes, est l’un des facteurs incriminés dans la progression de l’obésité infantile. Des auteurs se sont récemment penchés sur l’influence délétère qu’elle pourrait avoir sur la qualité des repas familiaux et l’apprentissage alimentaire chez les enfants.

Un tiers des enfants de moins de 6 ans regarde la télévision en mangeant

On le sait : la consommation de fruits et légumes durant l’enfance est un bon prédicteur de leur consommation à l’âge adulte. On sait également que le développement des habitudes alimentaires des enfants est fortement influencé par la famille. En structurant les repas, en fournissant la nourriture et en modelant les comportements, les parents sont des acteurs déterminants pour la qualité de l’alimentation de leurs enfants.

Depuis quelque temps, on commence à s’intéresser de près à l’influence exercée par l’environnement des repas – en particulier du diner familial – sur la qualité alimentaire. On a constaté, par exemple, que les enfants et les adolescents sont plus enclins à consommer les fameux “5 fruits et légumes par jour” s’ils prennent un diner en famille la plupart des soirs de la semaine. D’un autre coté, regarder la télévision, en particulier pendant les repas, est associé à une plus faible consommation de fruits et légumes chez les enfants. Or, un tiers des enfants de moins de 6 ans regarde la télévision en mangeant. Etudier l’impact des comportements durant les repas sur la qualité alimentaire peut suggérer des stratégies d’intervention, notamment dans les milieux défavorisés, qui sont particulièrement exposés aux maladies chroniques comme l’obésité.

Des familles issues du programme WIC

Une équipe de chercheurs en nutrition du département de la santé de New York s’est intéressée de près à l’influence de la télévision au cours du diner familial sur le comportement alimentaire des enfants. Cette étude a porté sur des familles de milieu défavorisé participant au programme WIC (Women, Infants and Children) de supplémentation nutritionnelle pour les femmes et les enfants. Plus de 1300 paires parents-enfant (âge moyen : 2,8 ans) ont été enquêtés. D’un coté, on a évalué la qualité de l’alimentation familiale en mesurant la fréquence à laquelle les parents proposaient des fruits (2 à 3/j), des légumes (2 à 3/j) et des laitages (3/j) à leurs enfants. D’un autre, on a rapporté le nombre de diners pris en famille durant la semaine et le nombre de jours où la télévision était allumée pendant le repas. On a passé ces données à la moulinette des régressions logistiques pour étudier les associations entre les variables nutritionnelles et ces facteurs d’exposition.

Plus on regarde la télévision, moins on mange de fruits et de légumes…

Premier résultat : on retrouve une association positive entre le nombre de portions de fruits, légumes et laitages et le nombre de diners pris en famille. Seconde donnée intéressante : les portions de fruits et de légumes (mais pas les laitages) sont inversement associées au nombre de soirées au cours desquelles la télévision fonctionne durant le diner. Il est à souligner que l’on regarde plus la « fée télévision » en mangeant, dans les familles avec un faible niveau d’éducation que dans celles de niveau supérieur.

De manière plus détaillée, les analyses de régression individuelle mettent en évidence que les Odd ratio des portions de fruits, légumes et laitages augmentent avec le nombre de diners pris en famille (respectivement + 12%, + 14%, + 9% par soir de la semaine). A l’inverse, ceux des légumes diminuent avec chaque soirée passée devant la télévision (- 6%). Des tendances et des chiffres du même ordre sont retrouvés dans les résultats des régressions multiples qui prennent en compte l’ethnie (nous sommes aux USA) et le niveau d’éducation parental.

La famille ne compense pas l’effet délétère de la télé

Pour les auteurs, il est clair que le fait de prendre un diner en famille ne compense pas les effets négatifs de la télévision au cours des repas. Il conviendrait donc de donner ce simple conseil aux parents : éteignez la TV pendant le diner !

Ce conseil est d’autant plus impératif que d’autres études ont montré que les enfants et les adultes qui regardent la télévision en mangeant consomment moins de fruits et de légumes que ceux qui s’en abstiennent. Il serait, certes, excessif de conclure à une relation de causalité entre petit écran et carence en fruits et légumes. D’autres facteurs télévisuels peuvent ainsi jouer un rôle sur le comportement alimentaire des enfants (les spots publicitaires par exemple, mais nous en reparlerons prochainement…).

A l’heure où la progression de l’obésité infantile mobilise tous les efforts de prévention, il peut être utile de fournir aux parents des consignes simples : “Ne regardez pas la télévision pendant le diner ! Veillez plutôt à créer un environnement favorable avec des repas familiaux chaleureux qui sont les vecteurs essentiels d’une bonne éducation alimentaire pour les enfants”.

Thierry Gibault
Nutritionniste, endocrinologue, Paris - FRANCE
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