L’étiquetage des aliments

Mise en lumière des qualités nutritionnelles des aliments à l’aide d’un étiquetage à 5 couleurs sur le marché français Cohérence par rapport aux recommandations nutritionnelles

Une récente proposition française en faveur d’un système d’étiquetage nutritionnel en face avant des emballages

Dans les domaines de la santé publique et de l’alimentation, en France, plusieurs propositions récentes ont envisagé, en complément d’autres outils, l’utilisation d’un système d’information complémentaire présentant des informations nutritionnelles à l’avant des emballages de manière à aider les consommateurs sur les lieux d’achat. Cette signalétique résumerait la qualité nutritionnelle de l’aliment ou de la boisson 1, et serait établie selon le profil nutritionnel défini par l’Agence des Normes Alimentaires, la Food Standards Agency Britannique (score FSA) 2-4. Le format proposé distinguerait 5 niveaux de qualités nutritionnelles, au moyen d’un code couleur (système 5-Couleurs ou 5C) présentés sous la forme d’une chaine de cinq cercles de différentes couleurs (vert, jaune, orange, rose et rouge), le cercle le plus grand correspondant à la qualité nutritionnelle du produit en question (voir la figure 1).

Comment présenter le profil nutritionnel sous la forme d’un étiquetage adapté au marché français ?

Cependant, certains ajustements du profil nutritionnel original peuvent être nécessaires pour que le système utilisé soit conforme à l’étiquetage et aux recommandations nutritionnelles françaises 5. Enfin, pour être efficace dans un contexte d’achat, le système 5-CNL devrait permettre de distinguer la qualité nutritionnelle des aliments parmi les différents groupes d’aliments (par exemple, le système doit mettre en évidence que les fruits et légumes (F&L) ont une meilleure qualité nutritionnelle que les friandises), mais également au sein d’une même catégorie (par exemple, parmi les produits laitiers, la signalétique doit pouvoir montrer que le yaourt présente une meilleure qualité nutritionnelle que la crème au chocolat).

Objectifs : une classification conforme aux recommandations françaises

Notre étude avait pour objectif de répondre à deux questions :

  • l’étiquetage nutritionnel à 5 couleurs (5-CNL) disposé à l’avant des emballages et élaboré selon le profil nutritionnel de la Food Standards Agency britannique, parvient-il à mettre en avant la qualité nutritionnelle des aliments actuellement disponibles sur le marché français ?
  • Cet étiquetage est-il conforme aux recommandations françaises en matière de nutrition ?

7 777 aliments du marché français ont été analysés

La composition nutritionnelle de 7 777 aliments disponibles sur le marché français a été analysée à partir du projet participatif en ligne Open Food Facts. Le score FSA de chaque produit a été calculé selon sa teneur en énergie, sucres simples, acides gras saturés, sel, protéines et fibres et le pourcentage de F&L pour 100 g de produit. La distribution des produits parmi les catégories du système 5C a été évaluée en fonction des groupes d’aliments, tels qu’ils sont présentés dans les rayons des supermarchés. Le pouvoir discriminant du système, a été établi selon le nombre de couleurs présentes dans chaque groupe d’aliments. En cas de différence entre la catégorie attribuée et les recommandations nutritionnelles françaises, des adaptations du score original ont été proposées.

Une cohérence globale avec les recommandations françaises

Globalement, la répartition des aliments dans les catégories du système 5C était conforme aux recommandations françaises : 95,4 % des F&L ainsi que 72,5 % des «céréales et pommes de terre» ont reçu la couleur verte ou jaune, tandis que 86 % des «friandises sucrées» ont obtenu la couleur rose ou rouge. En outre, au sein chaque groupe, la classification 5-CNL est également parvenue à souligner efficacement les différentes qualités nutritionnelles de plusieurs sous-groupe de produits, différences qui ont bien été mises en évidence (présence d’au moins 3 couleurs ; figure 2). Par exemple, parmi les «produits laitiers et les desserts frais», le «lait et les yaourts» ont systématiquement été classés dans une qualité nutritionnelle supérieure aux «desserts lactés et autres desserts frais» (figure 2). Dans la catégorie des F&L, les légumes ont principalement obtenu la couleur verte (87,7 %), à l’exception de quelques produits étiquetés jaunes (10,6 %) et roses (0,3 %). Les fruits ont eux aussi principalement obtenu la couleur verte (94,5 %) ou jaune (3,8 %), à l’exception de quelques produits avec la couleur orange (1,6 %). Les fruits secs, en revanche, étaient principalement étiquetés orange (72,7 %), voire rouges (3 %).

Des adaptations nécessaires pour se conformer aux recommandations françaises.

Le modèle de calcul du score FSA original a dû être adapté pour les boissons, les graisses ajoutées et le fromage afin de correspondre aux recommandations nutritionnelles françaises officielles. Pour les boissons, les composantes « énergie » et « sucre » du score FSA ont été modifiés en fonction de la répartition de ces deux éléments au sein de cette catégorie de produits. Ainsi, les boissons étaient mieux différenciées en fonction de leur qualité nutritionnelle.

Pour le fromage, les protéines ont été intégrées au calcul, quels que soient les nutriments défavorables (énergie, acides gras saturés, sucre et sel), ce qui permettait de prendre en compte le calcium contenu dans ce produit.

Pour les matières grasses, la composante « acides gras saturés » du score a été ajustée en fonction de la répartition de cet élément dans la catégorie des matières grasses, permettant ainsi une distinction entre les graisses ajoutées d’origine animale et végétale.

Une performance satisfaisante

L’étiquetage 5-CNL possède une bonne performance pour différencier la qualité nutritionnelle des différents groupes d’aliments, des aliments au sein de ces groupes et des produits de différentes marques. Le modèle original a dû être adapté pour obtenir un système hautement efficace tout en restant conforme aux recommandations françaises.

Chantal Julia
Université Paris 13, Equipe de Recherche en Epidémiologie Nutritionnelle (EREN), Centre de Recherche en Epidémiologie et Statistiques, Inserm (U1153), Inra(U1125), Cnam, COMUE Sorbonne Paris Cité, F-93017 Bobigny, FRANCE & Département de Santé Publique, Hôpital Avicenne (AP-HP), F-93017 Bobigny, FRANCE
Serge Hercberg
Université Paris 13, Equipe de Recherche en Epidémiologie Nutritionnelle (EREN), Centre de Recherche en Epidémiologie et Statistiques, Inserm (U1153), Inra(U1125), Cnam, COMUE Sorbonne Paris Cité, F-93017 Bobigny, FRANCE & Département de Santé Publique, Hôpital Avicenne (AP-HP), F-93017 Bobigny, FRANCE
Emmanuelle Kesse-Guyot
Université Paris 13, Equipe de Recherche en Epidémiologie Nutritionnelle (EREN), Centre de Recherche en Epidémiologie et Statistiques, Inserm (U1153), Inra(U1125), Cnam, COMUE Sorbonne Paris Cité, F-93017 Bobigny, FRANCE
  1. Hercberg S. 2013. Paris. 28-5-2014.
  2. Arambepola C, et al. Public Health Nutr 2008;11:371-8.
  3. Rayner M., et al. 2005. London, FSA. 16-1-2014.
  4. Rayner M., et al . 2009. London, OfCom. 16-1-2014.
  5. Julia C, et al. The British journal of nutrition 2014;112:1699-705.
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