DIABÈTE DE TYPE 2 : LA PROGRESSION EST-ELLE INÉLUCTABLE ?

Prévenir le syndrome métabolique pour prévenir le diabète : “ça marche !”

Le syndrome métabolique est aujourd’hui clairement identifié comme une constellation de facteurs de risque associant, à des degrés divers, des anomalies lipidiques (caractérisées par un HDL bas et des triglycérides élevés), une hypertension artérielle, une intolérance au glucose et, élément princeps, un tour de taille augmenté, reflétant l’obésité abdominale. Il y a tout lieu de penser que ce syndrome détrônera bientôt le tabac comme facteur de risque numéro 1 des maladies cardio vasculaires (1).

Un stress oxydant élevé

On connaît aujourd’hui le rôle central joué par l’insulino résistance et la graisse viscérale. Diverses études ont mis en évidence l’importance du stress oxydant comme facteur favorisant la dysfonction endothéliale, les lésions vasculaires et l’athérogenèse. Ainsi, une étude s’est intéressée au statut en antioxydants de plus de 8000 sujets issus de l’étude NHANES III (2). Les taux de vitamines C, E, A, sélénium et divers caroténoïdes, ont été comparés selon que les sujets présentaient ou non un syndrome métabolique. Les auteurs ont montré que les concentrations en Vit C et caroténoïdes étaient inversement proportionnelles au nombre de critères du syndrome métabolique. Deux mécanismes possibles pouvaient expliquer ce déficit de capacité antioxydante : un défaut d’apport en anti oxydants (lié à une faible consommation de fruits et de légumes) associé à un excès de leur utilisation, lié à un niveau élevé de stress oxydant, favorisé par l’obésité, l’hyperglycémie, l’hypertension artérielle et l’hypertriglycéridémie.

Réduire l’incidence du diabète

Prendre en charge le syndrome métabolique est important pour prévenir l’apparition d’un diabète de type 2. Cela a été clairement démontré par la Finnish Diabetes Prevention Study (3) qui a révélé que la réduction du poids et des apports en graisses, en particulier saturées, associée à une augmentation de la consommation de fruits et légumes et de l’activité physique, réduisait de 58% l’apparition d’un diabète à 4 ans.

Le régime méditerranéen semble le plus adapté à la prévention du syndrome métabolique comme l’a démontré une étude récente, menée par une équipe italienne(4). Son objectif : étudier l’impact d’un régime méditerranéen sur la fonction endothéliale et l’inflammation vasculaire, chez des patients présentant un syndrome métabolique. 180 sujets porteurs d’un tel syndrome ont été randomisés en deux groupes d’intervention nutritionnelle. La moitié a suivi un régime de type méditerranéen, l’autre un régime contrôle.

Des conseils individualisés d’alimentation méditerranéenne

Les caractéristiques du régime méditerranéen étaient les suivantes. Coté macronutriments : 50-60 % de glucides, 15-20 % de protides, 30 % de lipides, dont moins de 10% sous forme de graisses saturées, des apports en cholestérol inférieurs à 300 mg par jour. En pratique, on demandait aux sujets de consommer quotidiennement : 250 à 300 g de fruits, 125 à 150 g de légumes, des noix (25-50 g), des céréales complètes (riz, maïs, blé) et des légumineuses (400 g), et de l’huile d’olive. Les conseils étaient individualisés et les sujets ont été suivis pendant 2 ans, avec des séances de groupe régulières avec les nutritionnistes.

Le groupe contrôle a reçu des recommandations générales d’alimentation saine, mais non individualisées et non spécifiques. La composition en macronutriments de ce régime était identique au groupe intervention. Les sujets bénéficiaient de sessions d’information régulières tous les 2 mois pendant 2 ans.

En plus de conseils alimentaires, les 2 groupes ont reçu des consignes d’activité physique régulière. Divers paramètres ont fait l’objet de mesures : fonction endothéliale, sensibilité à l’insuline (test HOMA), cytokines, CRP et autres constantes biologiques. A deux ans, les sujets avaient effectivement modifié leur alimentation dans le sens des recommandations. Ils consommaient, en particulier, 274 grammes de plus de fruits, légumes et légumineuses que les sujets du groupe contrôle.

Une réduction de moitié du risque de syndrome métabolique

En terme de résultats, par rapport au groupe contrôle, ils avaient perdu du poids, réduit leur tour de taille, amélioré leur glycémie, leur sensibilité à l’insuline, leur taux de triglycérides et de HDL cholestérol, et, cerise sur le gâteau, diminué leurs chiffres tensionnels.

Le fait le plus spectaculaire a été la réduction d’apparition du syndrome métabolique. Dans le groupe méditerranéen, seulement 40 sujets sur 90 ont développé un syndrome métabolique, contre 78 dans le groupe contrôle, soit une réduction de près de la moitié. En outre, quand on ajustait ces bons résultats aux variations de poids, les améliorations persistaient de manière significative dans le groupe méditerranéen.

La preuve est donc faite qu’une alimentation de type méditerranéen, caractérisée en particulier par une forte consommation de fruits et de légumes, réduit de moitié la prévalence du syndrome métabolique. C’est donc une stratégie sûre pour traiter ce syndrome et réduire les risques cardiovasculaires associés. Fait essentiel, les améliorations observées grâce à ce régime sont indépendantes des changements de poids. Selon les auteurs, elles reposent sur la réduction de l’inflammation et de la dysfonction endothéliale habituellement associées au syndrome métabolique. Il y a tout lieu de penser que ces améliorations sont la résultante de l’effet synergique de l’ensemble des changements alimentaires apportés par le régime méditerranéen.

Thierry Gibault
Nutritionniste, endocrinologue, Paris - FRANCE
  1. Deen D. Am Fam Phys, 2004, 69 – 12, 2875-82
  2. Ford E.S. et al, Diabetes, vol 52, 2003,2346-52
  3. Tuomilehto J et al. N Engl J Med 2001;344:1343-1350
  4. Esposito K et al, JAMA, 2004, 292, 12, 1440-46
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