Santé osseuse : misez sur une alimentation saine

Apports Nutritionnels et Santé Osseuse : une revue souligne l’importance d’une alimentation saine et variée

Alimentation de type méditérranéeen

| Jean-Michel Lecerf

Service Nutrition & Activité Physique – Centre Prévention Santé Longévité, Institut Pasteur de Lille, France

L’ostéoporose est une maladie multifactorielle touchant en Europe plus de 20% des femmes 50 ans et plus (Borgström, 2020). Aux côtés des facteurs génétiques, hormonaux, et bien sûr de l’âge, de très nombreux facteurs liés au mode de vie interviennent, au premier rang desquels l’activité physique et la nutrition (Rizzoli, 2010). Une récente revue de la littérature menée par une des meilleures équipes dans le domaine de l’os et de la nutrition (Rizoli, 2021) dresse un inventaire exhaustif de la question. Elle pointe l’importance d’apports adéquats en protéines, calcium et vitamine D, mais également en fruits et légumes.

Les auteurs ont examiné le rôle des nutriments, des aliments et de certains régimes alimentaires (au sens large), avec une approche nutritionnelle et scientifique rigoureuse.

Produits laitiers : un effet positif sur la densité minérale osseuse et le risque de fractures

Les produits laitiers remportent le palmarès en termes de preuves. Leur absence de consommation est associée à un risque accru d’ostéoporose et de fractures quel que soit l’âge (Opotowsky, 2003 ; Gouldin, 2004 ; Konstantinowicz, 2007). Les études d’observation montrent qu’une consommation élevée est associée à une augmentation de la densité minérale osseuse, de la solidité osseuse et à un moindre risque de fracture (Matkovic, 2004). Le bénéfice le plus net est observé pour les produits laitiers fermentés (Ong, 2020). Cet effet n’est pas lié au calcium seul mais bien à un effet matrice de l’aliment puisque, pour un apport calcique équivalent, une supplémentation en calcium est moins efficace sur la densité minérale osseuse qu’une consommation de fromage (Cheng, 2005). En effet, des apports élevés en calcium augmentent la densité minérale osseuse surtout chez l’enfant et l’adolescent, mais il n’a pas été démontré de réduction du risque de fracture (Winzenberg, 2006).
La vitamine D joue également un rôle essentiel dans le métabolisme osseux. La supplémentation en vitamine D et en calcium réduit le risque de fractures chez les sujets à risque et chez les sujets âgés (Yao, 2019).
Le rôle des protéines est établi par des études épidémiologiques prospectives qui montrent que des apports élevés sont associés à une réduction du risque fracturaire surtout pour les protéines laitières. Les interactions calcium-protéines et calcium-vitamine D-protéines semblent favorables.

Fruits et légumes : une consommation régulière réduirait de 8% le risque de fractures

La consommation de fruits et légumes est également bénéfique sur la densité minérale osseuse. Les études d’observation montrent une réduction de 8 % du risque de fracture en cas de consommation régulière de fruits et de légumes (Brondani, 2019). Plusieurs mécanismes d’action sont évoqués pour expliquer cet effet protecteur :

  • une action alcalinisante des fruits et légumes agissant sur l’équilibre acide-base de l’organisme,
  • un effet antioxydant, lié à la présence de vitamine C, de bêta-carotène et de vitamine K dans les fruits et légumes
  • un effet prébiotique sur le microbiote, susceptible d’augmenter l’absorption calcique.

En effet, les études soulignent que le bénéfice de la vitamine A dépendrait de la source car seule la prise en compte du bêta-carotène permet d’observer une relation inverse avec les fractures (Charkos, 2020). Agissant sur la synthèse de collagène par les ostéoblastes et inhibant l’activité ostéoclastique via son effet antioxydant, la vitamine C est associée dans les études d’intervention à une forte réduction du risque de fracture du col du fémur (Zeng, 2020). La vitamine K est aussi un candidat mais l’effet, s’il existe, n’est que modeste.

Le régime méditerranéen, favorable pour la santé osseuse

Enfin, l’effet de plusieurs régimes alimentaires sur le risque d’ostéoporose ont été étudiés. Les régimes végétarien et surtout végétalien, ont un effet extrêmement délétère, atténué par des apports élevés en calcium (Ho-Pham, 2009). Les régimes amaigrissants ont également un effet délétère atténué par une supplémentation en protéines, calcium, vitamine D et par l’activité physique (Zibellini, 2015 ; Paccou, 2021). Le régime méditerranéen est celui qui est le plus favorable sur l’os.

Au-delà du rôle bénéfique largement établi du calcium et de la vitamine D, ce travail souligne à nouveau l’importance d’une alimentation saine, variée, riche en fruits et légumes pour la prévention de l’ostéoporose.

MESSAGES CLÉS

 

En prévention de l’ostéoporose, les auteurs recommandent une alimentation apportant :

  • 0,8 g de protéines/kg/jour (jusqu’à 1,3 chez les sujets âgés) ;
  • 800 mg à 1 g de calcium par jour ;
    800 à 1 000 ui de vitamine D,
  • 5 portions de fruits et de légumes, peu de sel (≤ 2,5g/j). Ils préconisent également un régime méditerranéen.

METHODOLOGIE

  • Bases de données utilisées : Embase et MEDLINE depuis leur création jusqu’en mars 2021.
  • Sont exclus les articles non rédigés en anglais.
  • La majorité des résultats proviennent des études d’observation

 

D’après : Rizzoli R et al. Nutritional intake and bone health. Lancet Diabetes Endocrinol 2021; 9: 606-21.
  • Rizzoli R, et al. Maximizing bone mineral mass gain during growth for the prevention of fractures in the adolescents and the elderly. Bone 2010; 46: 294–305.
  • Okyay E, et al. Comparative evaluation of serum levels of main minerals and postmenopausal osteoporosis. Maturitas 2013; 76: 320–25.
  • Opotowsky AR, Bilezikian JP. Racial differences in the effect of early milk consumption on peak and postmenopausal bone mineral density. J Bone Miner Res 2003; 18: 1978–88.
  • Goulding A, et al. Children who avoid drinking cow’s milk are at increased risk for prepubertal bone fractures. J Am Diet Assoc 2004; 104: 250–53.
  • Konstantynowicz J, et al. Fractures during growth: potential role of a milk-free diet. Osteoporosis Int 2007; 18: 1601–07.
  • Matkovic V, et al. Nutrition influences skeletal development from childhood to adulthood: a study of hip, spine, and forearm in adolescent females. J Nutr 2004; 134: 701S–05S.
  • Ong AM, et al. Fermented milk products and bone health in postmenopausal women: a systematic review of randomized controlled trials, prospective cohorts, and case-control studies. Adv Nutr 2020; 11: 251–65.
  • Cheng S, et al. Effects of calcium, dairy product, and vitamin D supplementation on bone mass accrual and body composition in 10-12-y-old girls: a 2-y randomized trial. Am J Clin Nutr 2005; 82: 1115–26.
  • Winzenberg T, et al. Effects of calcium supplementation on bone density in healthy children: meta-analysis of randomised controlled trials. BMJ 2006; 333: 775–78.
    Ebeling PR, et al. Management of endocrine disease: therapeutics of vitamin D. Eur J Endocrinol 2018;179: R239–59.
  • Yao P, et al. Vitamin D and calcium for the prevention of fracture: a systematic review and meta-analysis. JAMA Netw Open 2019; 2: e1917789.
  • Brondani JE, et al. Fruit and vegetable intake and bones: a systematic review and metaanalysis. PLoS One 2019; 14: e0217223.
  • Charkos TG, et al. Effects of β-carotene intake on the risk of fracture: a Bayesian meta-analysis. BMC Musculoskelet Disord 2020; 21: 711.
  • Zeng LF, et al. Can dietary intake of vitamin C-oriented foods reduce the risk of osteoporosis, fracture, and BMD loss? Systematic review with meta-analyses of recent studies. Front Endocrinol (Lausanne) 2020; 10: 844.
  • Ho-Pham LT, et al. Effect of vegetarian diets on bone mineral density: a Bayesian meta-analysis. Am J Clin Nutr 2009; 90: 943–50.
  • Zibellini J, et al. Does diet-induced weight loss lead to bone loss in overweight or obese adults? a systematic review and meta-analysis of clinical trials. J Bone Miner Res 2015; 30: 2168–78.
  • Paccou J, et al. Bariatric surgery and osteoporosis. Calcif Tissue Int 2021.
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