Influence sociale : frein ou levier pour agir sur les comportements alimentaires ?

Avis d’expert – Psychologie et alimentation : 2 questions à Jérémie Lafraire

Jérémie Lafraire Docteur en sciences cognitives
UPMC-Sorbonnes Universités
A propos de l’auteur

Jérémie Lafraire est docteur en sciences cognitives (UPMC-Sorbonnes Universités), diplômé de l’Ecole Normale Supérieure (Paris, Ulm), et habilité à diriger des recherches. Il dirige le groupe Food Cognition au Centre de recherche et d’Innovation de l’Institut Lyfe (ex Paul Bocuse) et est chercheur associé au Laboratoire CHArt, Cognitions Humaine et ARTificielle, EPHE – PSL, École Pratique des Hautes Études – Paris Sciences Lettres. Jérémie travaille principalement sur les mécanismes cognitifs qui sous-tendent l’expression des préférences et des rejets alimentaires au sein de différentes populations.

Idée reçue 1 Nos besoins nutritionnels conditionnent nos préférences alimentaires Vrai & Faux

Car cette notion est discutée dans la recherche. En effet, s’alimenter ce n’est pas simplement satisfaire ses besoins nutritionnels et il faut prendre en compte toute une complexité comportementale.

D’une part, c’est vrai, il existe, une forme de « sagesse nutritionnelle » (Provenza, 2018), un comportement adaptatif ancestral qui consiste à aller chercher les nutriments dont on a besoin au moment où en a besoin. Par exemple, en cas de déficience en vitamine C, notre corps va s’orienter vers des aliments qui en contiennent. Ce phénomène est bien documenté et s’avère vrai pour les micro et les macronutriments (Brunstom & Schatzker, 2022). Mais ce n’est pas la seule source d’influence qui conditionne nos mécanismes alimentaires. Ainsi, nous sommes programmés dès la naissance pour aimer le sucre et le gras et pas l’amer (selon la théorie évolutionniste). Cependant, cette prédisposition à préférer le sucre et le gras n’est plus adaptée à nos besoins. Or, nos préférences continuent de se porter vers des aliments qui ne sont pas nécessaires et excèdent même nos besoins. Il en découle un décalage : ces mécanismes adaptatifs (Rioux et al., 2022) ne sont plus adaptés à notre environnement alimentaire.

Plus largement, il faut garder à l’esprit que les préférences alimentaires ne sont pas uniquement conditionnées par nos besoins alimentaires. Elles le sont aussi par facteurs psychologiques, sociaux et culturels. Prenons l’exemple de la néophobie alimentaire qui consiste en une peur de la nouveauté (Pliner & Hobden, 1992). Des différences interindividuelles existent et chacun d’entre nous peut être plus ou moins néophobe. A l’extrême opposé, certaines personnes, baptisées dans le monde de la recherche des « Sensations seekers », vont être à la recherche de nouvelles sensations, de nouvelles expériences sensorielles (Zuckerman, 2007). On le voit bien, les préférences alimentaires de ces deux types de profil vont être très différentes et n’ont donc rien à voir avec nos besoins nutritionnels.

Idée reçue 1 Nos besoins nutritionnels conditionnent nos préférences alimentaires Vrai & Faux

Car cette notion est discutée dans la recherche. En effet, s’alimenter ce n’est pas simplement satisfaire ses besoins nutritionnels et il faut prendre en compte toute une complexité comportementale.

D’une part, c’est vrai, il existe, une forme de « sagesse nutritionnelle » (Provenza, 2018), un comportement adaptatif ancestral qui consiste à aller chercher les nutriments dont on a besoin au moment où en a besoin. Par exemple, en cas de déficience en vitamine C, notre corps va s’orienter vers des aliments qui en contiennent. Ce phénomène est bien documenté et s’avère vrai pour les micro et les macronutriments (Brunstom & Schatzker, 2022). Mais ce n’est pas la seule source d’influence qui conditionne nos mécanismes alimentaires. Ainsi, nous sommes programmés dès la naissance pour aimer le sucre et le gras et pas l’amer (selon la théorie évolutionniste). Cependant, cette prédisposition à préférer le sucre et le gras n’est plus adaptée à nos besoins. Or, nos préférences continuent de se porter vers des aliments qui ne sont pas nécessaires et excèdent même nos besoins. Il en découle un décalage : ces mécanismes adaptatifs (Rioux et al., 2022) ne sont plus adaptés à notre environnement alimentaire.

Plus largement, il faut garder à l’esprit que les préférences alimentaires ne sont pas uniquement conditionnées par nos besoins alimentaires. Elles le sont aussi par facteurs psychologiques, sociaux et culturels. Prenons l’exemple de la néophobie alimentaire qui consiste en une peur de la nouveauté (Pliner & Hobden, 1992). Des différences interindividuelles existent et chacun d’entre nous peut être plus ou moins néophobe. A l’extrême opposé, certaines personnes, baptisées dans le monde de la recherche des « Sensations seekers », vont être à la recherche de nouvelles sensations, de nouvelles expériences sensorielles (Zuckerman, 2007). On le voit bien, les préférences alimentaires de ces deux types de profil vont être très différentes et n’ont donc rien à voir avec nos besoins nutritionnels.

Idée reçue 2 La pression de l’image corporelle ne touche que les femmes Faux

Les problèmes d’image corporelle ne sont pas réservés uniquement aux femmes mais touchent aussi la population masculine. La raison pour laquelle cette idée reçue est bien ancrée se trouve peut-être dans les données de prévalence de l’anorexie mentale. L’anorexie mentale est en effet le cas extrême d’un trouble du comportement alimentaire associé à de fortes perturbations de l’image et du schéma corporel (dysmorphophobie) ainsi qu’à un taux de mortalité important. Or, l’anorexie mentale est beaucoup moins fréquente chez les hommes que chez les femmes, les données obtenues dans les populations cliniques retrouvant en général un ratio selon le sexe de 1/10.

Il serait néanmoins erroné de penser que les hommes sont épargnés de la pression de l’image corporelle. Il existe maintenant des catégories de troubles des conduites alimentaires qui touchent principalement les hommes. Par exemple l’anorexie inversée ou bigorexie (Mosely, 2009 ; Blomeley et al., 2018). Il s’agit de jeunes hommes qui cherchent à avoir une masse musculaire conséquente. Cela se traduit par une absorption de protéines très importante dans leur alimentation, notamment via des compléments alimentaires, couplée à une activité physique excessive. Outre des atteintes rénales fréquentes, ce trouble peut entrainer un isolement social (refus des invitations pour continuer à contrôler son alimentation) ainsi qu’une souffrance psychologique. Cependant, la bigorexie n’entre pas dans le périmètre officiel des TCA et cela pose des problèmes pour aider les personnes qui en sont atteintes. D’autant que cette image du corps socialement acceptable est amplifiée par les réseaux sociaux ; de nombreux influenceurs présentent cette image du corps comme un objectif de développement personnel. Ce nouveau phénomène pour l’instant peu connu, devient donc un véritable sujet sociétal.

Idée reçue 2 La pression de l’image corporelle ne touche que les femmes Faux

Les problèmes d’image corporelle ne sont pas réservés uniquement aux femmes mais touchent aussi la population masculine. La raison pour laquelle cette idée reçue est bien ancrée se trouve peut-être dans les données de prévalence de l’anorexie mentale. L’anorexie mentale est en effet le cas extrême d’un trouble du comportement alimentaire associé à de fortes perturbations de l’image et du schéma corporel (dysmorphophobie) ainsi qu’à un taux de mortalité important. Or, l’anorexie mentale est beaucoup moins fréquente chez les hommes que chez les femmes, les données obtenues dans les populations cliniques retrouvant en général un ratio selon le sexe de 1/10.

Il serait néanmoins erroné de penser que les hommes sont épargnés de la pression de l’image corporelle. Il existe maintenant des catégories de troubles des conduites alimentaires qui touchent principalement les hommes. Par exemple l’anorexie inversée ou bigorexie (Mosely, 2009 ; Blomeley et al., 2018). Il s’agit de jeunes hommes qui cherchent à avoir une masse musculaire conséquente. Cela se traduit par une absorption de protéines très importante dans leur alimentation, notamment via des compléments alimentaires, couplée à une activité physique excessive. Outre des atteintes rénales fréquentes, ce trouble peut entrainer un isolement social (refus des invitations pour continuer à contrôler son alimentation) ainsi qu’une souffrance psychologique. Cependant, la bigorexie n’entre pas dans le périmètre officiel des TCA et cela pose des problèmes pour aider les personnes qui en sont atteintes. D’autant que cette image du corps socialement acceptable est amplifiée par les réseaux sociaux ; de nombreux influenceurs présentent cette image du corps comme un objectif de développement personnel. Ce nouveau phénomène pour l’instant peu connu, devient donc un véritable sujet sociétal.

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