David et Goliath

COMMENT AMÉLIORER LA QUALITÉ DE L’ALIMENTATION EN RESTAURATION COLLECTIVE ACTUALITÉS SCIENTIFIQUES

Les recommandations relatives à la nutrition pour la restauration collective sont parues en 1999 dans un document réalisé par le Groupe Permanent d’Etude des Marchés des Denrées Alimentaires (GPEMDA).

Ces recommandations concernent toutes les collectivités publiques qui gèrent leur service de restauration, ou font appel à des sociétés de service. Elles s’appuient sur des avis émis par le Conseil National de l’Alimentation (CNA). Pour résumer, les objectifs nutritionnels majeurs sont de diminuer les apports de lipides et d’augmenter ceux de fibres, de vitamines, de fer et de calcium.

DES RECOMMANDATIONS TROP CENTRÉES SUR LES NUTRIMENTS

Bien que ces recommandations soient parfaitement justifiées, suffisent elles à induire de bonnes pratiques et à aboutir à une offre alimentaire de bonne qualité nutritionnelle ?

Il est clair que cela n’a pas suffi pour garantir une nourriture d’excellente qualité dans nos écoles ou dans nos hôpitaux. Pour quelle raison ? Simplement parce que des préconisations en terme de couverture de nutriments ou micronutriments ne suffisent pas à élaborer une nourriture de bonne qualité nutritionnelle et organoleptique. Les exemples abondent. Ainsi, le GPEMDA ne donne aucune recommandation sur les quantités ou la diversité des fruits et légumes à apporter, alors que les indications sont extrêmement précises sur les apports de calcium et de produits laitiers.

15 repas sur 20 au minimum doivent apporter des crudités ou des fruits crus, or il serait souhaitable d’apporter une crudité et un fruit cru à chaque repas, ou au moins un de ces types d’aliments à tous les repas. Puisque l’offre moyenne en légumes est d’un repas sur deux, les fruits et légumes sont sans doute complètement absents dans certains repas. 15 entrées, 6 fritures et 4 desserts, contenant plus de 15 g de lipides chacun, peuvent être servis sur les 20 repas d’une semaine. Si on ajoute les autres aliments contenant naturellement des graisses (viandes, produits laitiers) ou accompagnés de matières grasses, il y a peu de chance d’aboutir à une nourriture légère sur le plan calorique.

UNE ALIMENTATION GLOBALE À VALORISER

Ces recommandations sont trop centrées sur la couverture de certains nutriments, sans considérer la question de l’alimentation globale à valoriser.

Une bonne alimentation préventive est constituée d’une grande diversité de produits végétaux naturels, associés à des produits animaux complémentaires. Il est essentiel de fonder des recommandations sur la complémentarité des aliments qui entrent dans un repas, c’est à dire sur la qualité des associations alimentaires : favoriser la consommation de produits bruts ou transformés de bonne densité nutritionnelle et proposer une nourriture qui s’inspire du modèle méditerranéen.

L’intérêt de ce modèle, reconnu par tous les nutritionnistes pour la population générale, est également à appliquer en restauration collective, plutôt que de persévérer dans la situation alimentaire actuelle, où beaucoup trop de repas sont élaborés à partir de produits alimentaires intermédiaires, souvent riches en calories vides.

QUELQUES RÈGLES SIMPLES

Encore faut-il se donner les moyens d’élaborer des bons menus et de faire aimer les fruits et légumes !

A cette fin, certaines règles simples peuvent être mises à profit :

  • Une crudité sera toujours mieux consommée en début de repas lorsque l’estomac crie famine.
  • Un plat principal gagne toujours à associer le produit animal avec une source de féculents et de légumes.
  • Au même titre qu’un produit laitier, un fruit (de saison si possible !) doit toujours être inclus dans le menu.
  • Il est déconseillé de consommer plus de deux sources de protéines animales au sein d’un même repas.
    Par ailleurs, on n’expliquera jamais assez à quel point de nombreux produits transformés ne présentent aucune complémentarité, parce qu’ils sont constitués des mêmes ingrédients énergétiques (sucre, amidon, matières grasses, dérivés du lait ou du soja).

DES ASSOCIATIONS ALIMENTAIRES JUDICIEUSES

Outre ces principes élémentaires, l’élaboration des menus devrait s’appuyer sur l’efficacité de certains types d’associations alimentaires pour assurer un équilibre nutritionnel :

  • Associer le plus souvent possible les produits céréaliers aux légumes secs, pour la complémentarité de leurs protéines et de leurs micronutriments, de même que les pommes de terre avec divers légumes.
  • Concernant les viandes ou les produits laitiers, il faut bien insister sur la nécessité de compléter ces produits animaux par un apport élevé de légumes et de fruits, en particulier pour équilibrer les propriétés acidifiantes des viandes par les effets alcalinisants de ces végétaux. Sans fruits et légumes, les produits laitiers associés à du pain, des biscuits, des céréales ou des viandes n’aboutissent pas à une prise alimentaire favorable au maintien de l’équilibre acido-basique et à la réduction des pertes de calcium urinaire.
  • Autre recommandation utile : toujours compléter les produits salés par des aliments riches en potassium (le boudin par la pomme, le jambon par le melon, les charcuteries par des crudités ou des pommes de terre) et éviter d’associer plusieurs aliments salés (pain avec fromage et charcuterie). Le potassium est un bon “antidote” du sodium, et il est important pour prévenir le risque d’hypertension artérielle.

    En conclusion, il faudrait sans doute élaborer les menus de la restauration collective comme ceux de la population générale, c’est-à-dire avec une approche globale, basée sur la diversité, la complexité et la complémentarité des aliments de bonne qualité nutritionnelle. Mais certes cela nécessiterait de concevoir une autre façon de s’approvisionner et de préparer les aliments, bien différente du fonctionnement de beaucoup de restaurants actuels…

Christian Rémésy
Directeur de recherche - INRA - FRANCE
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