La qualité du mode de vie est associée à une meilleure santé mentale et à un ralentissement du vieillissement biologique
L’influence du mode de vie sur la santé fait l’objet de nombreux travaux et son impact sur les maladies chroniques est notamment bien documenté. Récemment, une étude a évalué l’influence de divers comportements (alimentation, activité, tabagisme, consommation d’alcool) sur la santé mentale et le vieillissement cellulaire. Les résultats montrent qu’il existe une corrélation positive entre l’adoption d’un mode de vie sain et le ralentissement du vieillissement biologique, ainsi que l’amélioration de divers aspects de la santé mentale.
D’après l’Organisation mondiale de la santé, un mode de vie sain « réduit le risque de tomber gravement malade ou de mourir prématurément » (OMS, 1999). Bien que les autorités de santé publique insistent sur l’importance des habitudes de vie, nombreux sont les individus qui ont encore des comportements néfastes à la santé tels que le tabagisme, le manque d’exercice et la consommation quotidienne d’alcool (OMS 2019 ; OMS, 2021). Ces comportements modifiables augmentent notamment le risque de maladies non transmissibles et, dans une moindre mesure, l’apparition de troubles mentaux (OMS, 2023).
Si de nombreuses recherches portent sur l’impact des comportements individuels sur la santé mentale, peu de travaux explorent l’impact combiné de ces comportements (Noble et al., 2015). Afin d’y pallier, une étude récente (Hautekiet et al., 2022) a évalué l’association entre des comportements de santé, la santé mentale, le bien-être ainsi que le vieillissement biologique.
L’adoption d’un mode de vie sain diminue le risque d’altération de la santé mentale et du bien-être
Ce travail a inclus 6054 adultes (51,2 % de femmes et 48,8 % d’hommes) âgés en moyenne de 49,9 ans (voir méthodologie). L’évaluation du mode de vie s’est basée sur le calcul d’un indice combinant l’IMC et 4 comportements de santé :
- L’alimentation (fréquence de consommation de fruits, légumes, snacks et sodas),
- La consommation d’alcool,
- La consommation de tabac,
- La pratique d’une activité physique.
D’après ce travail, un mode de vie plus sain – indiqué par un score plus élevé – est associé à une probabilité plus faible de conséquences néfastes sur la santé mentale et le bien-être. Après ajustement statistique, une augmentation d’un point de l’indice du mode de vie a été associée à une réduction du risque de souffrir de détresse psychologique sévère, de trouble dépressif, de trouble anxieux généralisé ou d’envies suicidaires. Ces observations sont similaires à celles rapportées par d’autres études, malgré des différences méthodologiques (Bowe et al., 2019, Jacka et al., 2017).
Les comportements défavorables à la santé associés à une accélération du vieillissement cellulaire
D’après cette étude, l’adoption d’un mode de vie sain est associée à la préservation de biomarqueurs du vieillissement cellulaire (voir encadré) tels que la longueur des télomères (voir figure 1 ci-dessous) et la teneur en ADN mitochondrial. En effet, les résultats montrent que plus l’indice de mode de vie est élevé, plus la longueur des télomères et les teneurs en ADN mitochondrial sont importantes.
A l’inverse, un mode de vie moins sain est associé à une augmentation du stress oxydatif, responsable de la dégradation de ces biomarqueurs et donc du vieillissement cellulaire prématuré.
Lors de l’exploration du lien entre les biomarqueurs du vieillissement et les résultats en matière de santé mentale, les personnes souffrant de détresse psychologique grave et ayant des envies suicidaires présentaient des taux plus faibles d’ADN mitochondrial que les sujets sains. Ce constat suggère qu’il existe une potentielle association entre la fonction mitochondriale et certains aspects de la santé mentale.
Des résultats à approfondir et compléter
Les conclusions portées par cette étude démontrent l’importance du déploiement de stratégies visant à améliorer le mode de vie des populations au sens large et par conséquent, la santé publique. Les auteurs indiquent que des études prospectives et longitudinales sont néanmoins nécessaires pour éclaircir les relations de cause à effet dans les associations observées. La santé mentale est-elle la cause ou la conséquence d’un mode de vie moins sain ?
En ce qui concerne les résultats relatifs à l’association entre certains biomarqueurs du vieillissement et la santé mentale, d’autres études ont abouti à des conclusions mitigées, notamment sur la longueur des télomères (Verhoeven et al., 2015 ; Simon et al., 2015 ; Pisanu et al., 2021). Des travaux supplémentaires sont ainsi nécessaires pour valider ces résultats et explorer les liens complexes entre le mode de vie, le vieillissement biologique et la santé en général.
Basé sur : Hautekiet P, et al. A healthy lifestyle is positively associated with mental health and well-being and core markers in ageing. BMC Med. 2022 Sep 29;20(1):328
Le vieillissement biologique est la conséquence de l’accumulation de divers dommages au fil du temps conduisant à la perte progressive de différentes fonctions de l’organisme et à l’apparition de maladies (Zhou et al., 2021). Bien que les facteurs biologiques en jeu soient complexes et multifactoriels, divers marqueurs dont l’expression augmente avec l’âge ont été identifiés. Deux d’entre eux sont examinés dans ce travail :
- La dérégulation mitochondriale : des défauts mitochondriaux sont détectés lors du vieillissement (anomalies morphologiques, nombre réduit de mitochondries, modification de l’ADN mitochondrial, …). Les mutations induites conduisent des perturbations profondes de l’ensemble de la chaîne respiratoire qui en retour favorise l’accumulation de radicaux libres, associée au stress oxydatif et donc au vieillissement.
- Le raccourcissement des télomères : les télomères sont des séquences hautement répétitives d’ADN situées aux extrémités des chromosomes à des fins de protection. Avec le temps, leur taille se réduit progressivement. Lorsque les télomères deviennent très courts, les cellules deviennent sénescentes, un état incompatible avec leur renouvellement et conduisant à terme, à la mort cellulaire.
- L’adoption d’un mode de vie sain est positivement associée aux indicateurs de santé mentale et de bien-être.
- La qualité du mode de vie est associée à la préservation de marqueurs du vieillissement biologique.
- Des travaux supplémentaires sont nécessaires pour déterminer la causalité de ces associations.