Pratiques parentales d'alimentation et comportements alimentaires des enfants

Diversification alimentaire : introduire en premier les légumes et les fruits permettrait de favoriser une consommation accrue plus tard dans l’enfance

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Les 1000 premiers jours de vie sont considérés comme une période clé pour la formation des goûts et habitudes alimentaires. Une étude australienne, réalisée sur près de 5000 enfants, s’est intéressée à l’influence des pratiques alimentaires durant les premiers mois (allaitement et diversification alimentaire) sur la consommation de fruits et légumes plus tard dans l’enfance. Selon ce travail, le facteur prédictif le plus net de la consommation de fruits et légumes est le type d’aliment introduit en premier lors de la diversification. Ainsi, chez les enfants pour lesquels la diversification a débuté avec des fruits ou des légumes, une consommation plus fréquente est observée dans l’enfance. La variété des légumes consommés est également plus importante lorsque la diversification a commencé par l’introduction de légumes.

Les bénéfices pour la santé d’une alimentation riche en fruits et légumes sont largement établis, avec un large consensus quant à leur rôle protecteur vis à vis des maladies chroniques. Malgré les campagnes de sensibilisation mises en œuvre par les autorités de santé, la consommation de fruits et légumes reste insuffisante dans de nombreux pays (Boeing, 2012). Ainsi, en parallèle de ces campagnes, mieux appréhender les déterminants des habitudes alimentaires reste un levier important, permettant notamment d’imaginer de nouvelles natures d’intervention.

Les premières années et, en particulier les 1000 premiers jours de vie, sont considérés comme une fenêtre d’opportunité majeure pour instaurer des habitudes alimentaires saines (De Cosmi, 2017; Hetherington, 2016; Barends, 2019). L’allaitement et la diversification alimentaire sont, en particulier, identifiés comme des périodes déterminantes. En effet, ce sont les premières occasions de rencontre (hormis l’exposition in utero via le liquide amniotique) entre l’enfant et les aliments : d’abord via le lait maternel, dont le goût et la composition varient selon l’alimentation de la mère, puis directement en les consommant.

Une récente étude australienne (Moss, 2020) s’est intéressée aux liens entre les pratiques d’allaitement et de diversification et les consommations de fruits et légumes (quantité et variété) plus tard dans l’enfance (voir méthodologie).

L’allaitement maternel est associé à une consommation plus variée de fruits et légumes

D’après ce travail, les enfants nourris au sein durant leurs 6 premiers mois, ou plus, consomment une variété plus grande de fruits et légumes que ceux allaités au sein moins longtemps.

D’autre part, les enfants nourris au sein plus de 6 mois ont une fréquence de consommation de fruits plus élevée que les autres. Cependant, aucune association n’est observée entre la durée d’allaitement au sein et la fréquence de consommation de légumes.

L’OMS recommande actuellement de pratiquer un allaitement maternel exclusif jusqu’à l’âge de 6 mois. Cette recommandation vise à la fois la bonne couverture des besoins nutritionnels de l’enfant, sa protection immunitaire grâce à la transmission d’anticorps par le lait maternel, mais répond également à des enjeux de sécurité microbiologique, notamment pour les pays où l’accès à l’eau potable n’est pas garanti.

En termes de consommation de fruits et légumes, pas de différence entre allaitement maternel exclusif, allaitement mixte ou diversification avant 6 mois

Certains pays, comme la France, recommandent de débuter la diversification alimentaire des enfants à partir de 4 mois révolus et avant 6 mois. Les auteurs ont ainsi cherché à savoir si le fait de diversifier l’alimentation des enfants avant 6 mois pouvait avoir une incidence sur les préférences alimentaires.

Selon ces travaux, la fréquence de consommation de fruits et légumes, ainsi que la variété des fruits consommés sont identiques chez les enfants ayant reçu un allaitement exclusif durant 6 mois et ceux dont l’alimentation a été complétée avec du lait infantile ou chez qui l’alimentation a été diversifiée avant 6 mois.

La variété des légumes consommés est légèrement plus élevée chez les enfants nourris exclusivement au sein, mais la différence n’était pas significative.

Ces résultats suggèrent que le fait de compléter l’allaitement maternel par des aliments solides et/ou du lait infantile avant 6 mois n’est pas associé à des différences dans la fréquence et la variété des fruits et légumes consommés pendant l’enfance.

Commencer la diversification avec les légumes, puis les fruits est associé à une consommation plus importante et variée durant l’enfance

Selon les pays, les recommandations concernant la diversification alimentaire sont variables que ce soit concernant l’âge à laquelle la débuter ou l’ordre dans lequel introduire les aliments.

D’après les résultats de cette étude, les aliments introduits en premier lors de la diversification influencent la fréquence et la variété des fruits et légumes consommés plus tard dans l’enfance.

Ainsi, dans l’échantillon analysé :

  • Les enfants ayant reçu des fruits ou des légumes en premier mangent plus fréquemment des légumes que ceux ayant reçu des céréales en premier.
  • Les enfants ayant reçu des fruits en premier (mais pas de légumes) mangent des fruits plus fréquemment que ceux qui ont reçu des céréales.

En termes de variété d’aliments consommés :

  • Les enfants ayant mangé en premier des légumes consomment une plus grande variété de légumes que ceux qui ont reçu des céréales.
  • De manière similaire, ceux qui ont reçu des fruits en premier mangent une plus grande variété de fruits que ceux qui ont reçu des céréales.

Etant donné qu’il est plus difficile d’encourager la consommation de légumes que de fruits chez les enfants, ces résultats invitent à privilégier des pratiques de diversification alimentaire commençant par les légumes.

La plupart des recommandations en la matière étant de commencer par les céréales, les auteurs soulignent la nécessité d’une révision de ces recommandations afin de favoriser la consommation de fruits et légumes.

Messages clés
  • La petite enfance est une fenêtre d’opportunité importante pour la mise en place d’habitudes alimentaires saines. Les pratiques d’allaitement et de diversification influencent, en effet, les préférences gustatives et alimentaires.
  • D’après cette étude, les preuves scientifiques les plus fortes concernent l’influence des pratiques de diversification sur la consommation de fruits et légumes dans l’enfance.
  • Accompagner les parents lors de l’allaitement et la diversification permettrait d’encourager l’introduction des légumes en premier ou a minima encourager l’utilisation de fruits et légumes plutôt que de céréales aux premières étapes de la diversification.
Méthodologie

Basé sur : Moss KM, et al. Associations between feeding practices in infancy and fruit and vegetable consumption in childhood. Br J Nutr. 2020;124(12):1320-1328.

Références
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