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Les changements de comportements alimentaires nécessaires à l’amélioration de la durabilité de l’alimentation en Europe

De nombreuses études ont évalué l’impact environnemental des régimes alimentaires actuels, ou des changements d’habitudes alimentaires, en utilisant le plus souvent les émissions de gaz à effet de serre (EGES) comme indicateur environnemental. Ces études ont principalement montré que la viande et les produits laitiers sont parmi les aliments qui contribuent le plus aux EGES, alors que la consommation élevée de fruits et légumes (F&L) et la consommation de légumineuses et fruits à coque sont associées aux EGES les plus faibles 1-3.

Le but de notre étude était d’identifier les changements alimentaires nécessaires pour parvenir à une alimentation nutritionnellement adéquate générant moins d’EGES dans 5 pays européens : la Finlande, la France, l’Italie, la Suède et le Royaume-Uni.

Les 3 scénarios étudiés

Les consommations alimentaires ont été tirées d’enquêtes nationales, incluant plus de 1000 personnes par pays (femmes et hommes entre 18 et 64 ans). La consommation moyenne, les EGES et la composition nutritionnelle de 151 aliments (répertoriés selon un système de classification FoodEx* adapté) ont été  estimées pour chaque pays et chaque sexe. La programmation linéaire a été utilisée pour concevoir les régimes spécifiques au pays et au sexe, nutritionnellement adéquats (respectant un ensemble de 32 recommandations nutritionnelles) selon 3 scénarios :

Scénario 1 : S’écarter au minimum du régime observé sans appliquer de réduction des EGES
Scénario 2 : Minimiser les EGES
Scénario 3 : S’écarter au minimum du régime observé et appliquer une réduction de 30 % des EGES.

Valeur énergétique et EGES dans les régimes observés et après application des recommandations nutritionnelles

Dans les régimes observés à travers les différents pays, la valeur énergétique variait entre 1591 et 1888 kcal/jour pour les femmes et entre 2109 et 2360 kcal pour les hommes. Les EGES variaient entre 3403 et 4321 g éq. CO2/jour pour les femmes et entre 4636 et 5793 g éq. CO2/jour pour les hommes. Dans l’ensemble des régimes étudiés, le principal aliment contribuant aux EGES était la viande – sauf pour les femmes finlandaises où il s’agissait des produits laitiers.

Chez les femmes, lorsque les recommandations nutritionnelles étaient appliquées (scénario 1), les EGES augmentaient par rapport au niveau observé, à l’exception du Royaume-Uni. Pour les hommes, l‘augmentation des EGES était observée pour tous les pays à l’exception de l’Italie et la Finlande. Pour les deux sexes, la majorité des 151 aliments ne connaissait pas de modification de quantité, sauf au Royaume-Uni où les femmes devaient modifier les quantités de 53 % des aliments. Leurs habitudes alimentaires étaient associées aux EGES les plus faibles par rapport aux autres pays. Leurs apports en magnésium, vitamine E, vitamine C, folates, zinc, fer, calcium, potassium et fibres étaient aussi les plus faibles.

La diminution drastique des EGES entraîne des modifications de la quasi-totalité du répertoire alimentaire

Selon le pays et le sexe, une diminution des EGES comprise entre 62 et 78 % était théoriquement réalisable (scénario 2), mais induisait une modification de quantité d’au moins 99 % des aliments par rapport aux régimes observés, avec le risque important de compromettre l’acceptabilité culturelle du régime.

Une augmentation de la consommation de F&L et féculents est nécessaire pour une alimentation durable

Dans toute l’Europe, des changements alimentaires, comprenant une diminution de la consommation de matières grasses, de sucre et de boissons alcoolisées, ainsi qu’une augmentation de la consommation de F&L et de féculents, étaient nécessaires pour parvenir à une alimentation nutritionnellement adéquate avec une réduction de 30 % des EGES (scénario 3).

L’étude a également montré la possibilité de modifier le type de produits d’origine animale en fonction des habitudes alimentaires des populations. Par exemple, dans ce scénario, la contribution des produits laitiers aux apports énergétiques est augmentée en Suède et en France pour les hommes et pour les femmes, mais diminuée au Royaume-Uni et en Italie pour les femmes. En outre, les apports énergétiques provenant du poisson sont augmentés en France et en Italie, mais diminués en Finlande.

Cette étude souligne l’importance de prendre en considération l’environnement, la diversité des habitudes alimentaires, les besoins nutritionnelles et l’acceptabilité sociale et culturelle avant de communiquer des messages de conseils alimentaires durable.

* FoodEx est un système hiérarchique de classification basé sur 20 catégories principales de denrées alimentaires qui sont ensuite divisées en sous-groupes jusqu’à 4 niveaux maximum. Il s’appuie sur plusieurs systèmes de description et de classification des aliments.

F. Vieux, M. Perignon, R. Gazan and N. Darmon. Dietary changes needed to improve diet sustainability: are they similar across Europe? European Journal of Clinical Nutrition 72, 951–960 (2018).
  1. Hyland JJ, Henchion M, McCarthy M, McCarthy SN. The climatic impact of food consumption in a representative sample of Irish adults and implications for food and nutrition policy. Public Health Nutr. 2016; 20: 726–28.
  2. Temme EHM, Toxopeus IB, Kramer GFH, Brosens MCC, Drijvers JMM, Tyszler M, et al. Greenhouse gas emission of diets in the Netherlands and associations with food, energy and macronutrient intakes. Public Health Nutr. 2015; 18: 2433–45.
  3. Vieux F, Darmon N, Touazi D, Soler LG. Greenhouse gas emissions of selfselected individual diets in France: changing the diet structure or consuming less? Ecol Econ. 2012; 75: 91–101.
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