Équation nutrition

Consommation de fruits et légumes chez les immigrés d’Afrique Sub-Saharienne en Australie : Implications pour la santé publique

L’abandon de certains légumes et fruits traditionnels

En Australie, les études récentes, 2 indiquent que les immigrés d’origine Africaine consomment moins de fruits et légumes que le niveau recommandé (à savoir : 2 portions de fruits et 5 portions de légumes par jour3). Si les consommations de fruits et légumes chez les immigrés australiens originaires d’ASS (Afrique SubSaharienne) ont diminué chez les adultes, elles demeurent adaptées chez les enfants. Ainsi, chez les immigrés originaires du Ghana résidant à Sydney, la consommation de fruits a diminué respectivement de 14,2 et de 12,6 portions par semaine chez les hommes et les femmes, par rapport aux consommations rapportées avant immigration2. Les immigrés Ghanéens ont remplacé les racines et les tubercules tropicaux par de la fécule de pomme de terre. Ces résultats reflètent ceux publiés par Burns4 qui rapporte que les réfugiées Somaliennes vivant à Melbourne avaient gardé une alimentation riche en fruits et légumes. Si après leur immigration elles avaient adopté une grande variété de fruits (i.e. pruneaux, kiwis, abricots) et légumes (i.e. brocoli) d’Australie, elles avaient délaissé certains légumes traditionnels et fruits tropicaux, pour diverses raisons dont un coût élevé, une faible disponibilité, des saveurs différentes ou déplaisantes par rapport aux aliments du pays d’origine.

Les enfants d’immigrés font mieux que leurs parents

Le tableau est très différent quand on s’intéresse aux enfants d’immigrés d’ASS. C’est ce que nous avons fait dans une étude récente portant sur les habitudes alimentaires après migration d’enfants d’immigrés Africains de 3 à 12 ans. La consommation
moyenne de fruits et légumes était respectivement de 546 g et 585 g (en écartant les jus de fruits et les pommes de terre) ce qui équivaut à 146% et 260% des recommandations Australiennes de consommation quotidienne de fruits et légumes chez les enfants de 4 à 11 ans5. Ces niveaux de consommation de fruits et légumes dépassaient non seulement les recommandations nationales mais également ceux de leurs camarades Australiens (qui atteignaient seulement 33 à 57% des recommandations pour les fruits et 32 à 40% pour les légumes). Ces résultats suggèrent donc qu’il existe une différence de génération concernant la consommation de fruits et légumes chez les immigrés d’ASS.

Mieux comprendre l’impact des croyances culturelles sur l’alimentation

Quand ils sont dans un nouvel environnement, les parents Australiens augmentent la disponibilité des fruits en laissant un plateau de fruits à disposition sur la table. De leur coté, les parents Africains vont acheter des fruits décoratifs en plastique et remplir leur réfrigérateur de viande en signe de richesse et de statut social élevé. Souvent, les adultes originaires d’ASS remplacent les aliments traditionnels – principalement des fruits et légumes riches en fibres et pauvres en matières grasses – par des aliments transformés d’origine animale, de forte densité énergétique et des plats préparés. Une telle substitution est influencée par les normes culturelles : les fruits et légumes sont socialement moins valorisés car ils symbolisent l’alimentation de subsistance des pauvres6. Il y a vraisemblablement besoin de recherches supplémentaires pour mieux comprendre l’impact des croyances et des attitudes culturelles sur les comportements alimentaires des immigrés d’ASS et leurs effets sur la santé.

André M.N. Renzaho
Centre de Collaboration OMS pour la prévention de l’obésité ,la recherche et l’enseignement, Université de Deakin, Australie
Alyce Wilson
Centre de Collaboration OMS pour la prévention de l’obésité ,la recherche et l’enseignement, Université de Deakin, Australie
  1. RENZAHO a, bURNS c. post-migration food habits of sub-saharan african migrants in victoria: a cross-sectional study. nutrition & dietetics 2006;63:91-102.
  2. SALEH a, AMANATIDIS s, SAMMAN s. the effect of migration on dietary intake, type 2 diabetes and obesity: the ghanaian health and nutrition analysis in sydney, australia (ghanaisa). ecology of food and nutrition 2002;41:255-270.
  3. Department of health and ageing. GO FOR 2 FRUIT AND 5 VEG. CANBERRA: AUSTRALIAN GOVERNMENT.
  4. BURNS c. effect of migration on food habits of somali women living as refugees in australia. ecology of food and nutrition 2004;43:213-229.
  5. RENZAHO a. migrants getting fat in australia, acculturation and its effects on the nutrition and physical activity of african migrants to developed countries. new york: nova publishers, 2007.
  6. RENZAHO a. fat, rich and beautiful: changing socio-cultural paradigms associated with obesity risk, nutritional status and refugee children from sub-saharan africa. health & place 2004;10:105-113.
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