Équation nutrition

Fréquence des conseils alimentaires en consultation de médecine générale

Les pathologies chroniques sont principalement représentées par les maladies cardiovasculaires, les cancers, les affections respiratoires chroniques et le diabète. En 2008, selon l’OMS, 63% des décès survenus dans le monde étaient dus à des maladies chroniques1. Elles représentent un enjeu majeur de santé publique par leur prévalence, leur taux de mortalité et leur coût. Multifactorielles, leurs facteurs de risque sont, pour la majorité, en lien avec la nutrition. Ce sont des facteurs de risque « modifiables », pouvant ainsi être les cibles d’actions de prévention nutritionnelle2.

Les 2/3 de la population consultent leur médecin généraliste (MG) une ou plusieurs fois par an, dont 90% au moins une fois tous les 5 ans3. 3/4 des MG pensent que leur rôle, en matière d’éducation nutritionnelle, est de donner des conseils préventifs personnalisés, même en l’absence de demande du patient4. Quelle est la fréquence des conseils alimentaires en consultation de médecine générale ? Quand sont-ils délivrés, quelle est leur cible et quelles en sont les modalités ?

Une étude descriptive des pratiques de médecine générale

Nous avons réalisé une étude descriptive des pratiques de médecine générale. Dix internes, en stage chez 10 maîtres de stage universitaire exerçant dans le Rhône, ont observé chacun 25 consultations, de mai à octobre 2018. Aucun des MG n’avait de diplôme complémentaire en nutrition. Pour assurer la validité des résultats et ne pas influencer le déroulement des consultations, le sujet de l’étude n’a été dévoilé aux MG participants qu’à la fin de la phase d’observation. Au total, 242 consultations ont été utilisées pour l’analyse statistique des résultats. Il y avait plus de MG masculins (70%) que féminins (30%). Leur âge moyen était de 55 ans et leur durée moyenne d’installation de 24 ans.

Le profil des patients

Il y avait plus de patients féminins (62,8%) que masculins (37,2%). L’indice de masse corporelle (IMC) moyen des patients était de 26,1 kg/m2 (plus élevé chez les hommes (27,2 kg/m2) que chez les femmes (25,5 kg/m2) (p=0,05)). Les données du dossier médical des patients ont permis de calculer l’IMC seulement dans 56% des cas. De plus, au cours des consultations, seulement 54,5% des patients ont été pesés et 6,3% ont été mesurés. Les internes ont dû estimer de manière subjective (ou visuelle) l’IMC de chaque patient au cours de l’observation des consultations. 70% des patients avaient au moins un antécédent de maladies chroniques. Les quatre principales étaient : l’HTA (26,4%), l’obésité (14,5%), le diabète de type 2 (11,6%) et les dyslipidémies (10,7%). 57% des patients consultaient pour une visite de suivi.

Un quart des consultations ont donné lieu à des conseils alimentaires

Un quart des consultations observées ont donné lieu à des conseils alimentaires (19,4%, IC95% [14,6%,25%]). Ce résultat, est comparable aux données présentes dans la littérature internationale à ce sujet5,6.

Seuls 17% des conseils alimentaires portaient sur la recommandation de consommer «au moins 5 F&L» par jour

Dans 78,7% des cas, les conseils alimentaires étaient donnés à l’initiative du MG et duraient moins de 3 minutes (78,7%). Les MG utilisaient majoritairement les repères alimentaires du PNNS2 seuls (60%) ou associés a d’autres conseils (23,4%). En dehors de l’eau à volonté, les conseils majoritairement donnés portaient sur des aliments à limiter et non sur des aliments à promouvoir. Seuls 17% des conseils alimentaires donnés portaient sur la recommandation de consommer au moins cinq fruits et légumes par jour.

Un bon aperçu des pratiques de prise en charge nutritionnelle en médecine générale

Notre population de patients était plutôt représentative de la population générale. Nous avons pu observer, en simple aveugle, un grand nombre de consultations. Cela nous a permis d’obtenir un bon aperçu des pratiques de prise en charge nutritionnelle en médecine générale.

Les limites de l’étude

Notre population de MG n’était pas représentative des MG exerçant dans le Rhône. L’échantillon de patients ayant reçus des conseils alimentaires étant faible, cela nous a limité pour l’analyse statistique des facteurs déterminant la présence des conseils alimentaires en consultation. Les conseils alimentaires donnés étaient brefs (moins de 3 minutes) et nous n’avons pas pu montrer leur impact sur la durée des consultations.

Le manque de temps reste un obstacle !

En pratique, un quart des consultations de médecine générale donnent lieu à des conseils alimentaires. Ces conseils, donnés à l’initiative du MG sont brefs et basés sur les recommandations nationales2. Les MG, qui déclarent manquer de temps pour la prévention nutritionnelle4, donnent le plus souvent des conseils lorsque les patients (âge avancé, sexe masculin, surpoids ou obésité) ou leurs pathologies (consultations de suivi, antécédents de maladies chroniques) le nécessitent.

D’après SHMITZ N. Fréquence des conseils alimentaires en consultation de médecine générale : observation directe des consultations par les internes en stage chez les médecins généralistes exerçant dans le Rhône. Thèse pour le diplôme d’état de docteur en médecine. 2019